A l’heure où la guerre est ouvertement déclarée contre l’Occident, la déclaration du Pape François a une dimension autre que celle du Vatican. Elle concerne en effet l’attitude que les gouvernements et les peuples peuvent avoir face aux ennemis de la liberté.
Il y a ceux qui s’inquiètent contre les victimes des hostilités, surtout quand l’ennemi se croit déjà le vainqueur. Le Pape François croit sincèrement qu’en Ukraine « les choses ne s’aggravent ». Il demande aux belligérants « d’avoir le courage de hisser un drapeau blanc et de négocier ». Il y a ceux qui estiment que la liberté est une valeur suprême, propre à la dignité de l’être humain ; elle appelle au combat, au courage de se battre même en position difficile : c’est ce qu’a dit et fait Jean Paul II prenant lui-même tous les risques d’affronter l’URSS quand elle occupait et asservissait la moitié des pays et des peuples européens1.
Finalement, la question essentielle aujourd’hui est à mon sens celle-ci : jusqu’où l’Occident veut-il aller pour défendre sa liberté contre l’agression islamo-communiste ? Elle ne cesse de s’affranchir de tous les « droits de la guerre », expression bizarre mais qui traduit une réalité dramatique : il n’y a plus de limite dans les crimes commis par les militaires et terroristes ennemis, et en effet les choses s’aggravent avec l’idée d’un « Sud global » qui se ligue aussi contre l’Occident.
La déclaration du Pape François me semble sans nuance. Diffusée par la télévision suisse de vendredi dernier, reprise dans la presse européenne samedi, elle invite les belligérants à s’en remettre aux bons offices de nombreux acteurs potentiels, elle désigne la Turquie, et le Pape François se dit prêt à rencontrer le Président Ukrainien Zelensky avec Erdogan à Istanbul qui s’empresse d’accueillir et de présider des négociations : « Nous sommes prêts à accueillir un sommet de la paix auquel la Russie participera ». A sa façon, la Pape rassure et honore les Ukrainiens « Négocier est un mot courageux. Quand vous voyez que vous êtes vaincu, que les choses ne marchent pas, ayez le courage de négocier » Je ne sais pas si ces mots traduisent la charité chrétienne Certes le Vatican mettra quelque bémol aux premières déclarations, précisant hier dimanche que la paix serait apportée “dans l’Ukraine martyrisée”. Il est dit aussi que « la formule “drapeau blanc” signifiait ici une cessation des hostilités, une trêve obtenue avec le courage de négocier plutôt qu’une reddition ».
Mais ces bémols n’ont pas suffi à créer l’harmonie. La colère des Ukréniens et de leurs amis s’est exprimée. L’ambassadeur d’Ukraine à Rome a cru bon d’évoquer la passivité du Vatican face aux nazis (les « silences de Pie XII » ne sont pas toujours bien perçus). Le primat de l’église Grecque-catholique, qui reconnaît le Pape pour son souverain pontife, a fait part de son hostilité à des négociations, sans citer le Pape. Le Président de la République de Lettonie, catholique comme la plupart de ses compatriotes, a regretté la position du Pape François.
Ce n’est pas la première fois que le Pape François prend des positions politiques qui semblent étrangères non seulement à sa mission épiscopale, mais aussi à la réalité des menaces qui pèsent sur l’Occident. Les premiers disciples et des milliers de martyrs ont refusé de hisser le drapeau blanc, des peuples entiers (comme les Chouans) ont été reconnus saints parce qu’ils ont préféré mourir au lieu d’accepter l’oppression et les crimes des Révolutionnaires français.
Résister et défendre la liberté,mourir pour la liberté, c’est bien la tradition chrétienne, car c’est un acte d’amour que de s’offrir en sacrifice : Jésus lui-même en a témoigné sur la croix.
1 Jean Paul II a failli succomber à un attentat sur la place Saint Pierre en 1981, il n a pas hésité à réunir un million de Polonais à Varsovie et Cracovie pendant la dictature communiste.