Le G 20 a-t-il un réel pouvoir ? Sans doute n’a-t-il aucune influence sur la marche de l’économie mondiale, qui fort heureusement repose encore sur les entreprises, même dans les pays de dictature comme la Chine, la Russie ou la Corée du Nord. Les Etats font tout ce qu’ils peuvent pour enrayer les échanges, multiplier les protections, les aides, les dévaluations, les normes mais ce capitalisme, même frelaté (crony capitalism, capitalisme de connivence) ne se fait pas ou pas encore autour d’une table où siège un cartel d’Etats appelé G 20.1
Il se trouve que ce G20, qui relie les vingt pays économiquement les plus puissants, a une présidence annuelle tournante, qui échoit cette année au Brésil. Mais le G20 a au moins un pouvoir important : dans le domaine de la communication. Il peut lancer des projets en forme d’élucubrations, et de ce point de vue le Brésil du Président Lula est bien placé. Il faut rappeler que cet homme était en prison quand il a été récemment élu avec une majorité de 50,1% des voix contre le Président sortant Bolsonaro, honni de tous les pays du monde, y compris de l’Occident parce qu’il a accepté la déforestation de l’Amazone, donc il a fait courir d’immenses risques à notre planète. Le torchon a brûlé entre la France d’Emmanuel Macron et le Brésil de Bolsonaro, on en est venu jusqu’à une rupture diplomatique. Les choses vont nettement mieux avec Lula da Silva, qu’on a sorti de prison où il purgeait une peine sans doute imméritée pour trafic d’influence, corruption et autres crimes mineurs. De plus, et c’est essentiel, Lula est communiste, et s’est toujours réclamé des Castro, Chavez et autres dictateurs latino-américains.
On saluera donc avec effusion la grande rencontre et la conférence de presse jeudi dernier à Washington de Fernando Haddad Ministre brésilien des Finances, et de notre ministre de Bercy depuis huit ans. Bruno Le Maire s’est déjà illustré dans son combat contre les GAFAM, il veut faire plier les très grandes entreprises qui dominent l’économie numérique. Grâce au Brésil, il va maintenant pouvoir mettre en place un plan complet de moralisation mondiale, pour garantir une concurrence saine et loyale. Avant-hier les Echos en ont fait leur une2, et voici les trois grandes mesures annoncées ;
1° Taxer les GAFAM : cela devrait être obtenu par l’OCDE dès le mois de Juin
2° Fixer à un taux de 15 % minimum le taux d’imposition des sociétés multinationales
3°Etablir une taxe de 2 % sur le patrimoine des 3.000 personnes les plus riches du monde.
C’est ce « troisième pilier » qui a fait l’objet de l’accord innovateur de Haddad et Le Maire.
La mesure est sensée rapporter chaque année 250 milliards de dollars (230,55 milliards d’euros) dit un économiste.
Les arguments des promoteurs de la taxe sont solides : ces très riches sont trop bien équipés pour frauder le fisc mondial : la peur de la taxe va sans doute les transformer en pénitents. D’autre part certains qui ne sont pas dans les 3.000 visés ne voudront pas entrer dans cette catégorie de privilégiés, donc c’en sera fini des gens qui cherchent à s’enrichir.
Enfin, ce n’est là qu’un des aspects de la justice fiscale et de la justice sociale : la richesse est un vol, de ce point de vie Bruno Le Maire reprend exactement le slogan de Poutou, fondateur du parti anti-capitaliste : la richesse est un vol.
Bruno Le Maire est sûr de son coup, qui doit être réussi, précise-t-il, avant 2027 – tant qu’on a la chance de l’avoir à Bercy (avant qu’il ne s’installe à l’Elysée) : « Cette proposition a le soutien du président du G20 » (Lula), mais aussi « celui du gouvernement français et de nombreux pays européens, et je pense que c’est un très bon point de départ ». Sans nul doute Poutine et les milliardaires russes, tout comme Xi Ji Ping et ses amis seront des soutiens inconditionnels de ce projet. D’ailleurs l’alliance avec un communiste corrompu n’est-elle pas une garantie pour de nouvelles mœurs dans les relations économiques mondiales ?
L’image de la France se valorise dans le monde entier.
1 Cf. l’article de Jacques Garello du 7 juillet 2023 Fondamentaux : « Doux commerce » ou Capitalisme de connivence La mondialisation hier, aujourd’hui, demain
2 Les Echos 18 avril 2024 Richard Hiault Paris et Brasilia main dans la main pour un impôt minimum des plus riches