Un sondage paru dimanche nous apprend que 59 % des Français sont favorables à ce que les policiers municipaux soient autorisée à porter des armes à feu et à s’en servir. Naguère l’initiative de doter ainsi les policiers était apparemment réservée à des municipalités de droite, comme Béziers ou Nice. Mais des maires de toutes couleurs politiques, et même de gauche, sont maintenant convaincus de cette réforme. Rachida Dati s’est depuis longtemps scandalisée de l’équipement des policiers parisiens : des bâtons, des paintballs, des munitions léthales, et l’obligation de retenue. Les syndicats de Policiers sont évidemment en faveur de cette réforme. On ne sait à cette heure si le gouvernement entend imposer les armes à feu dans toutes les municipalités de France : il demeurerait des communes, petites et moyennes, qui trouveraient une atteinte et non un renforcement des pouvoirs de police du maire.
Les arguments avancés dans le débat sont d’une qualité inégale. S’agit-il de protéger les citoyens ou les policiers ? Question souvent posée… Faut-il montrer les armes sans s’en servir ? Autre question semblable à celle de la dissuasion nucléaire. Les manifestations géantes provoquées par la mort de ces quelques héros qui ont été abattus alors qu’ils démolissaient et brûlaient avec courage des voitures de policiers malvenues dans certains quartiers, les assauts contre des commissariats, hauts lieux de la force publique ont été assez fréquents depuis un an. Bref, tout le monde pouvait se faire une opinion sur l’urgence et l’efficacité d’armer sérieusement les policiers municipaux, on estime d’ailleurs qu’à l’heure actuelle près de 70 % des policiers sont munis d’armes à feux.
Les libéraux, de leur côté, ont également leur opinion. D’une part les effectifs globaux de la police française sont nettement insuffisants. Les policiers fonctionnaires d’Etat sont au nombre de 150.000 environ, il faut y ajouter les effectifs de la gendarmerie nationale, et ceux évidemment des polices municipales. Il est vrai que le nombre de policiers pour 1.000 habitants est de 3,2, au niveau européen moyen, mais l’Allemagne est un peut en dessous (3) et il est difficile de faire mieux que les Finlandais (1,4 pour 1.000) et les Suédois (2 pour 1.000) ou les Suisses (2,2) voire les Irlandais et les Anglais (2,2). Ces comparaisons sont importantes parce qu’ils mettent en évidence plusieurs phénomènes : ce sont les pays les moins centralisés qui ont le moins besoin de police, ce sont aussi les pays où les enfants sont les mieux éduqués.
Les Français peuvent se rassurer à bon compte en observant les « mauvais élèves » : européens : Portugal, Italie, mais surtout Croatie, Bosnie, Serbie, Grèce, Bulgarie et la Turquie qui atteint 4,9 policiers pour 1.000 habitants.
Il n’en demeure pas moins que la police française est bien organisée comme toute administration de notre pays ; centralisée au niveau des ministères parisiens, bien présents sur place grâce aux préfets surpuissants, et multipliant les organismes qui se divisent la tâche, c’est-à-dire qui dispersent les efforts. Il n’en demeure pas moins également que la France est un pays où le taux d’immigrés non assimilés est le plus élevé au monde – seule la Belgique s’en approche.
Mais voici ce à quoi tiennent les libéraux : c’est d’avoir une justice à la hauteur de la police, fût-elle insuffisante. Car les policiers, à juste titre, se rendent compte de l’inefficacité de leurs courages et de leurs risques quand ils voient ce que deviennent les délinquants après l’intervention de ce qu’on appelle la justice. Le budget de la justice est encore plus réduit que celui de la police. Dans un article récent au Figaro, Nicolas Lecaussin, directeur de l’IREF faisait remarquer que « les dépenses sociales représentent 22 fois le budget de la sécurité et 143 fois le budget de la justice. »
La justice française est caricaturale. La Constitution la met sous le pouvoir direct de l’exécutif. Les magistrats sont des fonctionnaires sans indépendance, formés à l’Ecole Nationale de la Magistrature qu’il faut fermer, le syndicat majoritaire est l’allié de la gauche la plus extrême. Et les juges se justifient en disant que les prisons sont déjà surpeuplées. Mais pourquoi ne créons-nous pas davantage de prisons ? Et où sont les établissements spécialisés pour rééduquer une jeunesse perdue, qui est pourtant capable de reprendre le dessus et de développer ses capacités personnelles en rendant service aux autres, une fois libérée de ses addictions, à la drogue en particulier ?
Voilà aux yeux des libéraux le vrai problème : ce n’est pas en transformant les policiers en justiciers que l’on va progresser, le remède serait plus grave que le mal. C’est à se doter d’une vraie justice capable de faire respecter la sécurité des personnes et des biens, une mission qui lui a été allouée par la déclaration des droits de l’homme, mais aussi et surtout par cette vérité profonde : la justice est d’abord respect du droit naturel qui exige le respect de la liberté, de la responsabilité, de la propriété et de la dignité. 1
1 Cf sur ces problèmes les nombreux articles de la Nouvelle Lettre, sur les magistrats, l’Ecole de la Magistrature, mes prisons, et l’article de Jacques Garello Nanterre : les vraies raisons de cet abominale drame La police, la justice, l’éducation n’existent pas dans notre pays : pourquoi ?