Je m’exprime à titre personnel, je ne veux engager aucun vrai libéral de mon pays. Mais je me fais un devoir de donner un éclairage libéral à cet abominable drame.
Oui, le drame est abominable. D’abord parce que le jeune Naël a été tué dans des conditions inadmissibles. Le « refus d’obtempérer » ne peut être puni de la peine de mort. Ensuite parce que la mère de Naël a été prévenue par téléphone et a été priée de se rendre à la morgue pour identifier le cadavre de son fils. Encore parce que l’identité et l’adresse du policier qui a tiré ont été diffusées sur les réseaux « sociaux ». Enfin par l’immédiate politisation, sans grand respect pour la douleur de la famille et pour l’émotion causée non seulement dans les quartiers de Nanterre, mais dans toutes les zones de non droit qui se sont multipliées dans notre pays.
La politisation est surtout venue de la gauche extrême. Marie Tonnelier s’est à nouveau illustrée en soutenant que l’origine de l’affaire était le racisme des policiers désireux de tuer des Arabes et des Noirs. Quelqu’un a même déclaré que les policiers étaient des membres du RN entrés volontairement dans la police. Les députés locaux de la France Insoumise sont allés aux commissariats de Nanterre en pleine nuit, au milieu des incendies, des scènes de violence, des pompiers qui s’employaient avec courage. Le but de leur visite était de s’assurer des bonnes conditions de la garde à vue des jeunes interpelés. Ont mis aussi de l’huile sur le feu des hautes autorités morales comme Mbappé et Omar Sy, puisque le sport et le cinéma sont désormais foyers de moralité et de droit. Quant à nos gouvernants ils ont eu la décence de partager « l’émotion de la nation » et la sagesse d’appeler au calme (la famille elle-même a demandé une marche blanche demain après-midi). Le Président de la République a même déclaré que cette mort était « inexplicable et inexcusable », ce qui laisse à penser que le jugement peut être rendu avant même que la vérité soit connue et que la justice soir rendue. Vérité et justice doivent être en effet prioritaires, conformément au principe de l’état de droit.
Je serais tenté de dire que ces réactions sur-le-champ sont l’écume de la vague, car le drame abominable a pour véritable origine le fonctionnement structurel de la police, de la justice et de l’éducation. Police et justice sont réputées missions régaliennes, ce que dans une démocratie libérale devrait circonscrire la sphère de l’Etat. Or le budget que lui consacre l’Etat est d’environ 7% du total des dépenses publiques. En France le nombre de policiers par habitant est de 3,3, dans la moyenne européenne, mais la police est comme le reste jacobine : la police nationale est plus importante et mieux dotée que les polices municipales, les préfets ont plus de pouvoir que les maires en matière de sécurité. D’autre part les policiers sont investis de missions qui pourraient être assurées par l’initiative privée, comme la circulation urbaine, le dépôt des plaintes, la sécurité autour des écoles. Il est important, comme c’est le cas en Angleterre ou en Suisse, que les policiers soient au contact permanent des gens. Quant à la justice, elle ne peut être rendue dans les meilleures conditions, d’abord parce que les magistrats formés à l’Ecole Nationale de la Magistrature sont formatés au point que les crimes ne sont plus à mettre à charge des criminels, mais de la société qi les pousse au crime, ensuite parce qu’il n’y a pas de place dans les prisons ni d’établissements capables de rééduquer intelligemment des jeunes égarés dans la délinquance. R
Reste enfin l’Education, elle bénéficie au contraire d’un soutien financier important : première dépense publique (en concurrence maintenant avec le service de la dette publique). Il s’agit d’un monopole public, les écoles dites « privées » ne bénéficiant d’aucune autonomie dans le domaine de leur programme, de leur pédagogie, de leur finance, de la carrière de leurs enseignants. Cette éducation Nationale est incapable de former la jeunesse. Non seulement les jeunes n’ont aujourd’hui plus aucun savoir (et même dans la possibilité de communiquer et de s’exprimer), mais aussi l’absentéisme et la politisation du corps enseignant conduisent à des comportements de tension et de violence. L’école devient bien souvent, et bien sûr dans les Zones d’Education Prioritaires un apprentissage du harcèlement, du racket et de la drogue. L’école de Nanterre s’appelle Pablo Neruda et la cité voisine est Pablo Picasso. Voilà pourquoi la jeunesse est en cet état, à Nanterre comme ailleurs elle a pour avenir le non-travail et la non-culture.
Je conclue par une évidence : « changer les lois » n’est pas la solution, car le respect de la loi, bonne ou mauvaise, n’a aucun impact sur les comportements humains. C’est la formation des êtres humains, l’apprentissage de la vie en société et le développement de ses capacités, l’épanouissement de sa personnalité qui peuvent en finir avec la guerre civile latente. Pour tout cela il faut dénationaliser, décentraliser, mettre de la concurrence, de la responsabilité et de la dignité. C’est réussir une rupture libérale.