Eric Lombard, ministre de l’Economie et des Finances, et Amélie de Montchalin, ministre des Comptes Publics règnent à Bercy. Ils ont trouvé le moyen d’accroître sans problème les recettes fiscales. Il n’en coûtera rien au classe moyennes ni a fortiori aux Français les plus démunis, c’est un impôt qui ne concerne que les grandes sociétés et les milliardaires français. C’est un impôt à la Zucman, cet « économiste » américain qui veut que tous les pays du monde taxent les milliardaires, et la France donnerait ainsi le bon exemple.
La philosophie en est fort simple : les riches doivent payer la même proportion de leur revenu que les autres Français. Si un ménage de fonctionnaires gagne 60.000 euros dans l’année et paie 3.000 euros d’impôt sur le revenu, soit approximativement 5%, un milliardaire qui déclare des revenus annuels de 300 millions doit payer 15 millions d’euros. Cette démarche est présentée comme une justice fiscale, qui est un élément indispensable de la justice sociale.
Voilà de quoi séduire la gauche entière, des socialistes aux députés LFI. Mais les centristes l’acceptent aussi, tout comme la plupart des macroniens. C’est dire aussi leur niveau de culture économique. Car il n’y a rien de plus éphémère qu’une telle innovation discale, quel que soit le nom qu’elle porte.
La flat tax à la française
Certains artisans et partisans de l’impôt proportionnel l’appellent « flat tax », une expression qui fleure bon et l’égalité et l’efficacité. J’ai déjà, comme d’autres libéraux, dénoncé la supercherie . La flat tax s’appelle PFU Prélèvement Forfaitaire Unique, d’un taux global de 30 %, incluant 12,8 % au titre de l’impôt sur le revenu et 17,3 au titre des prélèvements sociaux. L’assiette de ce « prélèvement » est faire des « revenus de l’épargne et du capital : dividendes perçus par les actionnaires, intérêts
perçus par les obligataires ou les titulaires de livrets bancaires ou d’assurances-vie, mais les revenus du capital immobilier sont frappés par un autre impôt, l’impôt sur la fortune
immobilière, dite IFI. Tout cela fleure bon la bureaucratie française, mais aussi le génie français puisque c’est Emmanuel Macron qui a inventé ce PFU en 2018.
Qu’est-ce que les libéraux classiques entendent par flat tax ? Un seul taux d’imposition pour tout prélèvement quelle que soit l’assiette : sur la dépense (TVA) comme sur les revenus, quel que soit leur origine, et quel que soit le contribuable, riche, pauvre, classe moyenne,actif ou retraité. Et il est prouvé que la flat tax, la vraie, est actuellement adoptée dans 19 pays de l’Union Européenne et favorise la croissance.
Fiscalité et croissance
Voilà fort longtemps que la science économiste, la vraie, a découvert les relations entre fiscalité et croissance. Jean Baptiste Say, Charles Comte et Bastiat les évoquaient au 19ème siècle. D’après le modèle BAN on sait qu’il y a une corrélation inverse entre budget des services publics et croissance économique. Les pays les plus prospères sont ceux où la fiscalité est la plus légère. Cette corrélation statistique correspond à une loi économique et psychologique, qui s’applique incontestablement en France. Notre pays détient le record des prélèvements obligatoires, mais les recettes de l’impôt sur le revenu sont à un très faible niveau. C’est que beaucoup de Français qui travaillent, qui épargnent, qui entreprennent ont le sentiment que leur activité n’est pas rémunérée à leur juste valeur après des ponctions fiscales à leurs yeux trop lourdes. Quel va être leur comportement ? Certains vont s’exiler, ce sont en général des jeunes de haut niveau de formation (250.000 chaque année, dit-on), ou des footballeurs. D’autres feront un arbitrage entre travail et loisirs et rallongeront leurs week-ends et leur vacance : pourquoi travailler pour le percepteur ? D’autre encore passeront plus d’heures àpà des occupations non fiscalisées comme le travail à domicile, le bricolage. D’autres enfin pratiqueront toutes sortes de fraude, comme le travail au noir.
Le résultat global est logique : moins d’activité c’est moins de revenus ; donc moins d’assiette fiscale, donc moins de recettes fiscales « Les hauts taux tuent les totaux.
L’effet Laffer : qui peut y croire ?
J’ai rendu visite en mai 1959 à Alain Madelin dès les premiers jours de son installation à Bercy. Je pensais qu’il allait diminuer la fiscalité – au moins le taux de TVA. Mais il a au contraire augmenté de deux points ce taux. J’étais surpris et ulcéré, mais mon ami ministre (épisodique jusqu’en juillet) m’a expliqué : « A Bercy on ne croit pas à l’effet Laffer ! »
Il n’y a aucun doute sur le succès de la politique qui consiste à diminuer et le niveau et la progressivité de l’impôt sur le revenu. On parle beaucoup de Laffer parce que son nom est associé à la réforme fiscale de Ronald Reagan dès son élection en 1980. Mais d’une part Margaret Thatcher avait lancé la mode quelques années plus tôt, d’autre part Laffer a renoué avec une pratique antérieure des présidents américains . Le succès de cette « Loi fiscale de Renouveau Economique » a été total. Après avoir diminué le taux marginal de l’impôt de 70 à 40 % puis 20 % et avoir diminué le nombre de tranches de 14 à 4, puis à 2 Reagan a permis au trésor américain de retrouver une santé qu’il avait perdue depuis Août 1951 !
L’effet Laffer a une résonance considérable, elle marque la fin de la tyrannie du statu quo. Elle permet d’accompagner l’aisance financière de la réforme des retraites, de la fluidité du marché du travail, du retour aux libertés locales, et autres réformes structurelles qui s’imposent. Les réformes libérales de cette sorte ont permis à 19 pays au cours de la dernière décennie de diminuer le volume des dépenses publiques de l’Etat de plus de 3 points du PIB.
Pourra-t-on un jour convaincre les hauts fonctionnaires de Bercy ? Je pense qu’il est indispensable en tout cas de convaincre les électeurs et de les conduire à un vote libéral.
1-Cf mon article du 29 octobre 2024 Les milliardaires français soumis à la taxe Zucman Les milliardaires français la méritent bien
2-Cf. Mon article du 20 septembre 2024 (Actualité) David Lisnard à Bercy : enfin un budget en équilibre
3- Le traité signé par Reagan s’appelait ERTA Economic Recovery Tax Cut : quel beau titre pour la restauration économique de la France