Une fois réglée la réforme des retraites, Emmanuel Macron va devoir préparer avec son gouvernement un projet de loi sur l’immigration. C’est ce que prévoir le calendrier du Parlement même si l’actualité peut décaler le débat.
Ce débat risque d’être aussi tendu que celui sur l’âge de la retraite, parce que non seulement le Rassemblement National, mais aussi les Républicains d’Eric Ciotti ont un électorat particulièrement sensible au sujet. Sensibles aussi tous les gens qui vivent dans des villes et des quartiers où la densité d’immigrés est élevée et où le communautarisme est agressif.
Cependant, à la différence de la bataille qui s’achève autour de la réforme des retraites, où n’importe qui a dit n’importe quoi, sans que le système d’où viennent tous les maux soit mis en cause[1], l’immigration est scientifiquement étudiée dans un rapport de Fondapol rédigé par Dominique Régney. Il serait souhaitable que toute la classe politique lucide (ce qui exclut la NUPES) s’oblige à lire ce rapport et à y réfléchir. Le rapport mesure l’écart qui sépare la France de tous ses voisins européens : un record à nouveau. Cependant je me permets d’élargir le débat en soutenant que si l’immigration appelle un changement complet de politique, demeure aussi une interrogation majeure : les immigrés veulent-ils être Français ? Légiférer sur l’immigration sans prendre en compte que de très nombreux immigrés rejettent toute assimilation c’est laisser de côté ce qui est tout aussi important.
[1] On pourra se référer à mon article paru dans le Figaro le mardi 28 février « On a tout essayé sauf ce qui marche : la capitalisation »
La France décrite par le rapport Fondapol
Les chiffres ne manquent pas. Mais ils ont été collectés avec une rigueur scientifique, après examen précis des législations de chaque pays, et recueil de données incontestables sur les mouvements migratoires. Je ne vous communique que l’essentiel de ces informations qui conduisent à un diagnostic très clair de Dominique Reynié : la France est le pays le plus ouvert aux quatre vents de l’immigration, parce que la France est le pays le plus généreux pour les gens qui s’y installent.
Ouverte aux quatre vents : en France on n’expulse pas les étrangers sans papiers : seulement 15 % d’entre eux contre 43 % dans la moyenne européenne, et ceux qui ont été condamnés pour des délits ne sont pas expulsés. En France on pratique le regroupement familial, il est souvent ignoré ailleurs. En France l’immigration actuellement dominante est celle d’Africains sub-sahariens, leur logement, leur emploi et leurs compétences n’ont aucune importance. Pourquoi choisir la France ? C’est le pays le plus généreux : Aide Médicale Gratuite, et les étrangers peuvent demander un permis de séjour pour venir se faire soigner en France – on recense des Japonais, des Américains, des Allemands, etc. En France les immigrés accèdent très vite aux largesses de l’Etat Providence (dont on sait qu’il absorbe un bon tiers du budget), ils connaissent très vite leurs « droits sociaux ». Le ménage « monoparental » a une fréquence élevée, les enfants sont nombreux et les Caisses d’Allocations Familiales apportent toute l’aide voulue (et recherchée peut-être). Enfin et non le moindre, la naturalisation obéit à la loi du sol et elle est obtenue au bout de 5 ans, échéance la plus courte en Europe puisqu’en général c’est un séjour (sans histoire) pendant 8 à 10 ans suivant les pays qui est exigé. Le rapport est une mine de découvertes, sa lecture donne les mêmes sensations qu’un roman.
La difficulté de l’assimilation
La tolérance et la générosité sont souvent mal payées de retour. Il y a certes des liens entre le fait que la France est ouverte aux quatre vents et le fait que l’assimilation est difficile. Ces liens ont été par exemple exprimés par David Lisnard et Naïma M’Faddel « Le nombre est problématique : s’il est possible d’assimiler des individus, il n’est pas possible d’assimiler des peuples qui privilégient toujours leur mode de vie traditionnel par rapport au nôtre. Et c’est bien là que les politiques d’immigration massive, qui favorisent la ghettoïsation, sont désastreuses pour notre cohésion nationale »[1].
Toutefois je ne crois pas que le nombre soir l’unique obstacle à l’immigration. Indirectement il est fait ici référence à ce que font par exemple les Allemands : ils ont assimilé plus de 3 millions de Turcs, et plus de la moitié sont aujourd’hui de nationalité allemande. Mais, en effet, ils n’ont pas créé des ghettos : ils ont assigné à résidence les arrivants, et ils les ont obligés à apprendre la langue de Goethe. Peu ou prou les immigrés ont été amenés à abandonner leur mode de vie traditionnel. Il faut aussi se rappeler que rien n’est plus favorable à l’assimilation que le creuset de l’entreprise : travailler ensemble permet d’unir des personnes venues de toutes origines, voilà l’un des secrets du rêve américain, qui est d’ailleurs bien compromis aujourd’hui avec les communautarismes agressifs.
Mais en France non seulement ces modes d’assimilation ne sont pas pratiqués, et les ghettos existent, mais tout au contraire l’école et la culture font défaut. Parler français : mais les écoliers français eux-mêmes n’en sont plus capables quand les enseignants ont pour programme de leur apprendre à planter des arbres, à colorier sur des dessins tout préparés, quand ce n’est pas (comme bientôt) à connaître les beautés de l’éducation sexuelle. Et que dire quand dans certains quartiers on leur enseigne la langue de leur pays d’origine (dont ils ne savent rien !) Il est même reconnu que dans certaines ZEP, les maîtres forment de jeunes islamistes[2]. Je suis petit-fils d’immigrés italiens venus de la Ligurie en Provence. Mes grands-parents s’interdisaient de parler italien en présence des enfants. Evidemment ils étaient aussi catholiques, et la religion ne leur imposait pas sévèrement un mode de vie. Mais aujourd’hui la culture française existe-t-elle ? Elle donne le spectacle de la vulgarité, de la facilité, Molière est-il enseigné quelque part ? En ce moment les télévisions diffusent du féminisme, du misérabilisme, de l’écologisme. Ces spectacles peuvent-ils élever le capital humain ? Je suis libéral, mais conservateur, parce que les êtres humains ne peuvent vivre sans référence à quelque valeur spirituelle ou morale, et il faut des années pour y accéder – et on manque certainement d’ « influenceurs » comme Charles de Foucaud.
Il n’est pas jusqu’aux philosophes à la mode, aux historiens officiels, et même au Président de la République pour raconter aux immigrés de la deuxième ou troisième génération tout le malheur et tous les crimes que la France aurait commis en deux siècles de colonisation. Je faisais allusion à l’entreprise et au travail pour aller vers l’assimilation, mais cela suppose d ’une part que le chômage soit faible au lieu d’être subventionné, d’autre part que l’on ait appris à l’école le sens du travail, du respect des autres, de la discipline et de l’exactitude. Il est vrai que nos gouvernants veulent réinventer le service militaire, mais l’école, le collège et le lycée devraient être des foyers de convivialité, de dépassement et d’épanouissement.
J’espère vivement que le rapport Fondapol permette de passer d’une immigration massive à une immigration « choisie » (belle formule). Mais il faut aussi s’occuper sérieusement de faire revivre en France les principes de civilisation qui sont aujourd’hui oubliés. Ce souhait va-t-il rencontrer la volonté de nos réformateurs ?
[1] Le Figaro, 9 juillet 1921
[2] Jean-Pierre OBIN : Comment on a laissé l’islamisme pénétrer l’école Her
mann, éd. 2020