C’est à l’invitation d’Emmanuel Macron que 21 chefs d’Etat se réunissaient à l’Elysée. Des observateurs américains et asiatiques étaient également présents.
En fin de compte on retiendra de ce sommet la déclaration du Président français à l’issue des débats de la journée.
Tous les participants étaient évidemment persuadés que l’Ukraine avait besoin de leur soutien, le Président Zelensky les avait salués par visio tout en rappelant l’urgence de la situation : l’Ukraine manque de moyens et manque d’hommes.
Mais quel soutien ? Les besoins de l’Ukraine en armement sont bien connus : munitions, chars, artillerie, drones, missiles, mais surtout avions. Actuellement la guerre prend un tour dramatique parce que les Russes bombardent sans arrêt les villes, ce sont les civils qui sont les victimes les plus nombreuses. Il s’agit d’un crime de guerre, mais Poutine n’en a cure. Depuis l’origine des hostilités le problème de l’espace aérien a été abordé, mais jamais résolu par l’envoi d’avions capables de se mesurer avec la flotte aérienne ennemie. Bien entendu les morts et blessés de la population civile créent un climat de peur et de découragement – c’est bien ce que recherche Poutine.
Mais un sujet a fait l’objet des commentaires médiatiques et politiques : l’envoi de soldats européens en uniforme sur les champs de bataille. Par exemple, les Russes avaient miné des centaines d’hectares avant l’annonce de la contre-offensive ukrainienne de l’été. Ils avaient choisi les terrains de façon judicieuse, comme s’ils avaient connu d’avance les endroits où les Ukrainiens allaient s’engager (ainsi est accréditée la thèse selon laquelle les plans de la contre-offensive aient été connus des services secrets du Kremlin). Or, les militaires ukrainiens ne savent pas déminer, alors que plusieurs Européens, dont les Français, en sont capables. Peut-on lancer ces Français sur les champs de bataille ? Ne serait-ce pas entrer en belligérance ?
Le problème est que cette question n’a pas été envisagée de la même manière par les divers chefs d’Etat participants. L’un d’entre eux, peut-être agacé par la position du Président français qui avait mis la question à l’ordre du jour, a carrément affirmé que l’on n’avait pas parlé d’envoyer des soldats (le Suédois Kristersson). Mais d’autres participants en ont parlé, même s’ils désapprouvaient la position française. Le Président tchèque Petr Fiala a affirmé qu’il n’y avait pas besoin d’un accord général européen pour décider de la question : son pays, comme d’autres, avait signé des accords de mutuelle défense avec Kiev. Engager l’Union Européenne ce serait investir sur son budget, qui n’est pas très riche depuis le blocage américain et le Brexit (David Cameron était là).
En réalité, ce sont les propos d’Emmanuel Macron à l’issue de la réunion qui ont mis le feu aux poudres, puisqu’il a laissé entendre que la Russie devait perdre la guerre et que pour ce faire l’envoi de soldats n’était pas exclu. Bien sûr il a pris le soin de préciser que c’était « en dynamique » et que « rien » ne serait exclu. Le Président français a même déclaré que sa position relevait d’une « ambiguïté stratégique » : en quelque sorte je laisse planer le doute, c’est à Poutine de choisir. Lequel Poutine de répondre que les Français ne devraient pas s’en prendre à Moscou puisqu’en 1812 Napoléon et la Grande Armée ont dû se replier – la Berezina.
La vraie question est : Macron a-t-il parlé au nom de la France ou au nom de l’Europe ? La réponse ne fait guère de doute pour nous, mais elle ne le gêne « en rien » le Président puisque pour lui l’Europe c’est la France…