Elle a réellement de quoi se féliciter du referendum qu’elle a organisé : les Parisiens ont librement voté contre les trottinettes gratuites dans la ville de Paris. En effet la démocratie signifie la possibilité d’aller voter, et les Parisiens sont allés aux urnes.
Réduire la démocratie au verdict des urnes est déjà une hérésie : dans la plupart des dictatures les dirigeants ont été élus dans des bureaux de vote. Hitler, Mussolini et peut-être Lénine ont été librement élus par leurs peuples respectifs. La démocratie ne peut non plus signifier que la majorité peut faire n’importe quoi. Benjamin Constant parlait à ce sujet de la « démocratie à l’ancienne » : A Athènes les forums étaient accessibles à tous les citoyens, mais n’étaient citoyens ni les femmes ni les esclaves ni les métèques (étrangers immigrés) c’est-à-dire les neuf dixièmes de la population. Une minorité imposait sa loi au peuple entier. Par contraste la « démocratie moderne », disait Constant, est celle où les droits de la minorité sont respectés, quelle que soit l’issue du scrutin et la plus minoritaire des minorités est le simple citoyen : les droits individuels doivent être respectés.
Sans doute les Français sont-ils davantage habitués à la démocratie des anciens, et par les temps qui courent c’est bien cette démocratie que nous connaissons, puisque la majorité parlementaire est très minoritaire dans le corps électoral. Il est vrai que s’abstenir c’est voter. Mais d’une part Emmanuel Macron veut se prévaloir de la démocratie majoritaire, mais d’autre part il a inventé aussi sa propre démocratie : il a innové avec la démocratie « délibérative », celle qui consiste à mûrir une décision et établir un projet de loi à partir d’un libre débat avec le peuple, représenté par des citoyens tirés au sort, encadrés cependant par des citoyens triés sur le volet pour éclairer le bon petit peuple constituant une Convention Citoyenne : pour le climat, pour l’eau, et maintenant pour la fin de vie.
Mais la démocratie de Madame Hidalgo a aussi des caractères spécifiques. D’abord la maire de Paris se réjouit du choix fait par les électeurs :plus de trottinette gratuite sur les trottoirs et couloirs réservés de la capitale : dès septembre cela en sera fini (sauf manifestation des trottineurs (ce qu’on appelle la démocratie populaire).
Ensuite elle est satisfaite d’avoir enregistré un nombre élevé de votants : 7,6 % du corps électoral. C’est en effet très représentatif d’un consensus général. Enfin elle a pu constater que les votants sont essentiellement des personnes âgées, qui en effet risquent l’accident voire la mort en circulant sur des trottoirs théoriquement réservés à des piétons. En revanche les trottineurs qui sont en général des jeunes ne se sont pas dérangés du tout. Ils estiment avoir tous les droits, puisqu’en démocratie tout est permis à tout le monde : de vrais libéraux.