Valeurs Actuelles de jeudi dernier consacre quatre de ses pages à une interview de David Lisnard. La veille Jacques Garello avait exprimé dans nos colonnes tout le bien qu’il pensait de l’interview réalisée mardi matin sur LCI : oui, David Lisnard fait une offre politique nouvelle et a le courage de présenter les réformes libérales les plus détonantes, mais aussi les plus urgentes[1].
En lisant Valeurs Actuelles nous avons eu le sentiment non seulement que le Maire et Président de l’Association des Maires de France confirme ses engagements, mais aussi qu’il entre dans le jeu politique, notamment dans la double perspective de sa réélection en novembre de sa présidence de l’AMP et des élections européennes de l’an prochain (cette campagne est d’ores et déjà ouverte).
La confirmation est explicite. Quelques citations en attestent, et nous nous faisons un devoir de vous les reproduire pour le cas où l’offre libérale de David Lisnard vous intéresserait.
Rupture avec le système : « Nous assistons au dernier soubresaut d’un système […] bien antérieur à Emmanuel Macron […] et qui a atteint son paroxysme avec une politique de distribution social-étatiste […] Il faut en finir avec le régime des technocrates ».
La politique d’Emmanuel Macron : « Où sont ses actes, leur exécution, leur évaluation, leur amélioration ? » L’éducation (emplois du temps, programme scolaires) , la santé (manque de personnel, crise des urgences) : les moyens ne manquent pas :« Le manque de moyens vient de l’excès de mayens, De même que trop d’impôt tue l’impôt trop de dépense publique tue le service public ». L’inflation législative ? Les textes de loi dont se prévaut le Président : « Si l’efficacité était proportionnelle à leur nombre, nous serions les premiers en tout. »
Dépenses publiques : « Le quoi qu’il en coûte nous conduit à l’ivresse de la dépense publique qui nous mènera à la gueule de bois des restrictions : 50 milliards pour le seul service de la dette publique, quatre fois le budget de la justice. La messe fiscale est dite ».
Une nouvelle offre politique : « Le changement passera par des réformes radicales, comme la mise en concurrence des organismes sociaux, pour créer de la performance et réduire le coût des charges sociales […] Je suis pour une société d’indépendants, où les plus modestes peuvent devenir un capital intellectuel grâce à une instruction de qualité, et un capital financier grâce à des salaires plus élevés et une retraite par capitalisation. C’est cela qui changera tout, et pas d’énièmes dispositifs sociaux ».
Mais voici également que David Lisnard se présente en candidat homme d’Etat et en vient au jeu politique avec son parti Energie Nouvelle.
Un long paragraphe de l’interview porte sur les affaires étrangères. N’est-ce pas dans le domaine réservé du Président de la République, et l’actuel maître de la diplomatie n’a-t-il pas accumulé les échecs, en Europe, en Afrique ? Sur la question de la neutralité de l’Ukraine, il estime que c’est aux Ukrainiens à choisir entre l’intégration occidentale et la neutralité, c’est « le principe gaulliste de souveraineté »[2] . La souveraineté devrait être pour David Lisnard la ligne de conduite de la diplomatie française, mais quid des relations avec les Américains, mis sur le même pied que les Chinois et les Russes ? Et quid de l’Europe : celle de la Communauté et des libertés, avec le principe de mutuelle reconnaissance des législations et des normes (traité de Rome) ou celle de l’harmonisation et du dirigisme bruxellois (Maastricht, Lisbonne) ? Certainement David Lisnard aura à s’exprimer plus ouvertement sur la question.
Mais comme la prochaine élection générale en France est dans quelques mois, encore faut-il que Les Républicains aient choisi leur doctrine et leur position – et l’unanimité n’est pas évidente sur ce point. Les Républicains sont aussi derrière Eric Ciotti concernant l’immigration, et David Lisnard apprécie le travail fait par ce parti « depuis trente ans ». C’est à la différence du Président Macron qui déclare « en même temps » que l’immigration est une fatalité historique indéniable et que la situation créée par les immigrants ne saurait durer. Toutefois David Lisnard dans divers écrits est allé jusqu’à souhaiter l’assimilation, qui est bien davantage que l’intégration. Il a estimé que la culture française peut être acceptée par tout immigré, grâce à une éducation efficace. Il faudrait peut-être s’entendre sur la culture française : est-elle celle de la Révolution et de la laïcité républicaine ou celle de Corneille, La Fontaine et de nos cathédrales ? Au minimum il faut exiger le contenu humaniste de la culture, incluant les droits individuels et les institutions pour les faire vivre et survivre.
Par contraste le volet « économie libérale » des Républicains doit convenir à David Lisnard.
On saura bientôt comment les investitures pour les européennes s’organiseront « à droite »[3], mais le scrutin de liste est plutôt favorable à des candidatures communes LR et Energie Nouvelle.
Il y a cependant un point certain : le parti Energie Nouvelle créé par David Lisnard entend avoir toute son indépendance. D’abord parce que David Lisnard ne veut pas faire de compromission électorale ni de concession sur les principes : « Les idées avant tout » avait-il affirmé avec raison. « La seule façon de recréer la confiance est d’avoir des principes solides et de les mettre en application ». Ensuite parce que la concurrence et la compétition sont dans ses principes et dans son tempérament. Donc les Républicains ont une mission spécifique et exigeante « Il faut donner une chance aux Républicains d’être cette force qui réunit la droite classique ». Mais Energie Nouvelle a aussi son rôle à jouer, voici la toute dernière phrase de l’interview : « Mais il faudra porter un renouvellement et une espérance aussi sur les sujets de société, culturels et économiques. Nouvelle Energie est pour moi l’essentiel car c’est là que je peux exprimer librement mes convictions et travailler sur un contenu, pour montrer qu’un projet politique ne peut fonctionner que s’il est cohérent, qu’il ne doit pas être qu’une somme d’arrangements, mais la force d’un élan ».
[1] David Lisnard : une offre politique nouvelle, Nouvelle Lettre du 30 août 2023 Catégorie Actualité. L’analyse de Jacques Garello a été explicitement appréciée par David Lisnard.
[2] Notre point de vue est plus réservé sur cet argument Nul n’ignore que les Ukrainiens préfèreraient intégrer l’OTAN, mais en cas d’incertitude sur l’issue de la guerre actuelle la neutralité serait une concession acceptable par le Kremlin. Quant à la « souveraineté » encore faut-il s’entendre sur son contenu !
[3] De notre point de vue s’afficher ou être affiché comme « le candidat de droite » n’est pas un bon atout électoral pour deux raisons : le libéralisme n’est ni de droite ni de gauche, et la « droite » est-elle celle de Giscard, Sarkozy et Chirac ? Mais l’auteur de l’interview, Quentin Hoster a déjà choisi « la droite »