Avant-hier lundi à Nice une cérémonie très solennelle a accompagné les obsèques de
l’adjudant-chef Eric Comyn. La Légion d’Honneur , la Médaille militaire, la Médaille de la
Gendarmerie lui ont été décernées.
Le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin a prononcé un discours d’une grande tenue, qui a
été apprécié par tous les Français qui sont peinés mais aussi scandalisés par l’enchaînement
quotidien de crimes de toutes natures mais qui convergent dans le même sens : ignorer le
respect de la vie des autres, tuer sans compter.
Mais aussi tuer sans payer. Et c’est là que les erreurs politiques se sont aggravées et
multipliées depuis des décennies. L’impunité dont jouissent les meurtriers est
incompréhensible et impardonnable. Comment le jeune sauvage qui a tué la petite fille de
Vallauris peut-il dormir ce soir dans son lit à la maison ? Comment les attaques dont sont
victimes policiers et gendarmes sont-elles prévenues et réprimées ? Pourquoi les récidives ?
Pourquoi l’ignorance et l’irresponsabilité des bureaucrates qui continuent à délivrer permis
et allocations ?
Au minimum, la réforme d’une société qui veut retrouver l’état de droit et la paix civile est
l’investissement dans les forces de l’ordre. C’est à quelque soixante mille qu’on
a estimé le nombre de policiers qui seraient nécessaires pour assurer efficacement l’ordre
public, notamment avec la réimplantation de la police de proximité. Les Parisiens ont pu
constater que pendant les JO la présence de policiers aux abords des grands centres
d’intérêt (tour Eiffel, Trocadéro, Concorde, Louvre, Notre Dame, Bercy, etc.) a été très
bénéfique. Les voilà , comme dans la plupart des pays civilisés, en mesure de guider les
touristes, de les aider dans leurs recherches, et surtout de rassurer. Mais où est le budget
pour avoir 60.000 policiers ? Il est dans le budget de l’Etat sous forme de dotations au
ministère de la transition énergétique, ou sous forme d’allocations sociales versées à des
tricheurs et à des parasites. Il n’est plus dans le budget des communes, dépouillées par l’Etat
de tout moyen d’installer et développer une police municipale au contact des habitants. Ce
n’est pas, comme le croient certains, en armant les forces de l’ordre et en les autorisant à
s’en servir, que l’on règlera le problème 1 .
Mais la police ne fait pas la justice. Et la justice pénale n’existe plus en France, depuis bien
longtemps. Quel argument a convaincu le magistrat chargé des peines de ne pas garder en
+ 1 Cf. notre article du 16 avril 2024 La police ne fait pas la justice Armer les polices municipales : une idée à la mode. Mais qui rend la justice ?
détention l’assassin de la petite fille de Vallauris ?
Le procureur de la République a fait appel à sa décision, mais il faudra encore attendre plusieurs jours pour que l’appel soit jugé. En attendant, c’est la liberté pour l’assassin. Certains juristes ont l’art de trouver quelque texte ou quelque
interprétation de la loi pour innocenter, la mode n’est pas à la punition, la présomption
d’innocence a bonne presse. A tout cela, j’ai soutenu, comme tous les libéraux, que c’est le statut de la magistrature qui explique l’injustice pénale actuelle. Tout d’’abord nos
magistrats sont des fonctionnaires formés obligatoirement par l’Ecole Nationale de la
Magistrature à Bordeaux. Cette ENM formate les jeunes candidats à une idéologie bien
simple fondée sur deux principes :
1°Il n’y a pas de criminel, il y a une société qui pousse les gens au crime, parce qu’elle les
aliène, elle les exploite. Les vrais criminels sont ceux qui s’enrichissent : les crimes en col
blanc sont plus graves que les crimes de sang.
2°La prévention et la répression sont inefficaces, l’emprisonnement fabrique des récidivistes,
il faut miser sur l’évolution de la personnalité des coupables, assistés par les formations et
les aides de psychologues voire de psychiatres, cela est particulièrement vrai pour les
enfants et le adolescents.
Ce deuxième principe est d’ailleurs bienvenu, car les magistrats ainsi formatés se refusent à
condamner au prétexte qu’il n’y a pas de place dans les prisons. Une certaine association de
juges a même prétendu qu’il n’y a pas de place dans les prisons parce que l’on prononçait
trop de peines !
Mais quelle est la politique carcérale de la France ? A ma connaissance, une seule prison a
été programmée en dix ans, en Bretagne, et pour 2025. Or, la prison est une entreprise qui
peut être privatisée et marchande, comme elle l’est dans plusieurs pays civilisés 2 .
De façon plus générale, la magistrature française ne jouit d’aucune indépendance, elle est
sous le joug du pouvoir exéutif : le Conseil National de la Magistrature, présidé par le
Président, est tout un symbole. L’attribution des postes et l’avancement se font suivant le
mode hiérarchique dans l’arbitraire le plus total. La magistrature est politisée et syndicalisée.
Comme le disait David Lisnard la semaine dernière : l’un des six chantiers prioritaires à
mettre en œuvre pour sortir de l’impuissance publique est « la sécurité par un changement
total de la politique pénale et du fonctionnement de la justice ».
2 Tocqueville a été envoyé aux Etats Unis par le ministre français de la justice pour étudier
le système carcéral américain dont on disait le plus grand bien : prisons privées, travail des
prisonniers la journée en ville, et ils payent leur séjour. Cf. mon article (catégorie
Fondamentaux) du 15 Septembre 2023 Trop peu de prisonniers parce que trop peu de
prisons Le budget régalien est ridicule : comment réformer ?