Chaque année le rapport PISA fait grand bruit : le classement de la France s’est encore dégradé. Cette année s’ajoute l’étude inattendue sur les connaissances de nos collégiens et lycéens en mathématiques : double catastrophe !
Comme toujours les grands esprits du Ministère de l’Education Nationale s’interrogent sur les réformes à mettre en œuvre. Mais à ce jour les résultats ne semblent pas probants. Il en est tout différemment en 2023 parce que le Ministre n’est pas n’importe qui : c’est Gabriel Attal.
Il a déjà occupé les plus hautes positions dans la classe politique. Après avoir été en 2018 secrétaire d’Etat à la Jeunesse et l’Education Nationale auprès de Jean Michel Blanquer il sera en 2020 Secrétaire d’Etat auprès du Premier Ministre Jean Castex et porte-parole du gouvernement. Il sera ensuite au sein du gouvernement Borde Ministre délégué chargé des Comptes publics. Enfin en juillet dernier il accède au poste de Ministre de la Jeunesse et de l’Education Nationale ; succédant à Pap N’Diaye. A 34 ans il devient ainsi le plus jeune Ministre de l’Education Nationale de la Vème République.
Les exigences du « choc des savoirs »
Dès Octobre Gabriel Attal avait annoncé un « choc des savoirs » : la formule est en effet bien choisie, puisqu’on a du mal à la déchiffrer. Cependant il ne fait pas de doute que, savoirs ou pas, les réformes annoncées par le ministre entendent secouer sérieusement l’enseignement actuellement dispensé. « Il faut élever le niveau de l’’école et redonner de l’autorité aux enseignants »
La liste et le calendrier des réformes ont été détaillés dans la lettre adressée mardi aux enseignants :
Redoublement : le dernier mot sera aux enseignants (janvier 2024) aujourd’hui il semblerait que ce soient les parents qui décident d’un redoublement, finalement personne ne redouble
Primaire : nouvelles méthodes d’apprentissage des mathématiques (rentrée 2025) ; dans le primaire on fera appel à la méthode « Singapour » (d’origine française, précise le ministre) pour familiariser les jeunes enfants avec les fractions et les décimales.
Groupes de niveau au collège en 2024 et au lycée en 2025 : l’idée la plus contestée par les enseignants car on nivelle par le bas, mieux vaudraient des groupes réduits (mais c’est cher !)
Le brevet obligatoire pour entrer au lycée ; ceux qui ne réussissent pas pourraient réviser dans des classes spécialisées pendant les vacances.
Une nouvelle épreuve de bac (2025-2026) en fin de première, en plus du français : mathématiques et culture scientifique. Il va de soi que la seule perspective d’avoir une épreuve à passer stimule les efforts des candidats.
Notre intention n’est pas de passer au crible chacune de ces cinq réformes. Syndicats, associations de parents, spécialistes de la pédopsychologie, de la pédagogie s’expriment déjà et s’exprimeront sans doute bientôt davantage sur l’opportunité de ces réformes et les chances de les mener à leur terme.
Sans doute les enseignants, après quelque mauvaise humeur, seront-ils amenés à tenter l’aventure, car il est également prévu dans le plan Attal une revalorisation des salaires et de certaines retraites, pour rendre attractive financièrement une activité qui ne l’est guère moralement.
Mais il est évident pour les libéraux que ces réformes sont comme les précédentes : vouées à l’échec.
Des réformes venues d’en haut
Comme le veut la règle dans notre République, c’est le Ministère qui règle les détails-mêmes des changements. Même sur les questions financières ; sur lesquelles communes et départements sont concernés, l’Etat prendra en charge certains coûts des réformes. Il est vrai que l’Etat a rendu exsangues et endettées les collectivités locales. Mais voilà aussi l’enseignement en concurrence avec les dépenses sociales, écologiques, militaires, etc. Les arbitrages seront disputés.
Le « venir d’en haut » c’est aussi la mission assignée aux enseignants : ils doivent faire preuve « d’autorité ». Mais dans l’esprit de Gabriel Attal et du gouvernement, autorité signifie fermeté ; comme pour réduire l’insécurité : à l’école çà doit filer droit. C’est sans doute un vœu pieux dans les mois à venir, mais pourquoi pas ? Ce qui nous gêne c’est que l’autorité, et en particulier celle d’un enseignant, vient de ce que l’enseignant accroît les capacités de l’élève : auctor, c’est celui qui augmente. C’est la transmission du savoir qui est la vraie source de l’autorité et, par voie de conséquence de la discipline et du respect des autres. Quand le temps des élèves est désormais perdu en heures de discussion sur la sexualité, la République, les animaux sauvages, les plantes aquatiques et la décolonisation, il ne reste pas grand-chose pour le savoir. Et les enseignants trouvent-ils enthousiasme et méthode pour enseigner suivant les directives bureaucratiques qui viennent de la rue de Grenelle ? Il est maintenant reconnu que les chefs d’établissements ont perdu tout pouvoir autonome, mais les enseignants consciencieux ont aussi le sentiment qu’on ne reconnaît pas leurs qualités. Le nivellement par le bas est déjà amorcé.
La liberté scolaire
Les réformes libérales font le choix de la pluralité, de la concurrence et du libre choix des parents.
C’est bien le monopole de l ’Education Nationale qu’il faut supprimer. Il est révélateur d’ailleurs que Gabriel Attal envisage de créer des écoles publiques gratuites ; pourquoi pas ? Mais pourquoi écarter les initiatives privées ? Elles sont déjà nombreuses, depuis les écoles hors contrat jusqu’aux Montessori en passant par les écoles de quartier, les écoles d’entreprises, etc. L’éducation des enfants appartient aux familles, même recomposées ou monoparentales. C’est une lourde responsabilité, mais qu’il leur faut assumer. Aujourd’hui elles n’en ont pas le droit : la carte scolaire les condamne souvent, les conflits avec les enseignants se multiplient faute d’avoir d’autre solution.
L’Education « Nationale » est comme toute administration incapable de tenir compte des diversités qui caractérisent les individus : la règle, même absurde, même inadaptée, doit être respectée. Aujourd’hui on condamne les écoles libres au prétexte qu’elles sont des écoles de roches. Mais d’une part, si elles sont sous contrat elles n’ont qu’une liberté très limitée, d’autre part elles ont fleuri dans les quartiers pauvres et de nombreux aménagements permettent à des familles modestes de les fréquenter durablement.
En réalité le seul mais grand avantage de ces écoles est d’avoir été choisies par les parents, et les parents responsables veulent ce qu’il y a de mieux pour leurs enfants. Les questions d’argent sont réglées de plusieurs façons différentes, dans les divers pays du monde entier. Cela va du chèque-éducation aux « charter schools », ou aux écoles à la maison, suivant les pays ou les Etats. Alors les chefs d’établissements et les enseignants feront de leur mieux pour attirer et conserver les élèves, et ce ne sera qu’à partir de la qualité du savoir transmis et de la vie en équipe dans l’établissement que la sélection se fera, jusqu’à ce que le meilleur niveau soit atteint.
De cela il n’en est jamais question dans la plupart des programmes politiques. C’est exclu du programme élyséen et, comme toujours, comme pour les retraites, on ne veut pas connaître la seule réforme qui marche : la liberté1.
1 Cf l’article de Jacques Garello du 27 octobre 2023, Comment libérer l’école de la politique, du harcèlement et de la drogue, la solution : mettre en place la liberté scolaire et la communication active.
Il semble que l’état n’a pas assez d’argent pour payer convenablement ses professeurs mais nous venons d’apprendre que, pour expérimenter le port de l’uniforme dans certains établissements ‘pilotes’, l’état en question va payer un assortiment de T-shirts, de pull-overs et de pantalons à chaque élève.
Moi qui pensais que l’école était faite pour enseigner, j’apprends ainsi qu’elle a maintenant la mission d’habiller les enfants ; je suis vraiment d’un autre siècle… à moins que j’ai changé de planète.