Interrogée au Sénat jeudi dernier, Elizabeth Borne a dit tout le mal qu’elle pensait de ceux qui récupéraient à leur profit la mort de Thomas. « L’heure est à l’enquête et au recueillement… Elle exige Retenue et Décence ». Elle visait naturellement ceux qui avaient profité de cet affreux drame pour dénoncer l’impuissance du gouvernement à assurer la sécurité. Ils peuvent appartenir à un spectre politique assez large mais évidemment c’est « l’extrême droite » qui est au banc des accusés et vraisemblablement sa clientèle électorale ne cessera de s’élargir avec le nombre des victimes de la barbarie.
Mais la façon dont certains commentateurs ont approuvé et partagé la position de Madame le Premier Ministre est malgré tout surprenante, et la surprise peut aller jusqu’à la révolte.
Je vise en particulier BFMTV qui recevait Marion Maréchal Le Pen précisément jeudi dernier. L’émission était dirigée par Alain Marshall et Olivier Truchot, elle est visible sur Youtube. Je ne partage évidemment pas les opinions de la tête de liste de Reconquête pour les élections européennes (et encore moins celles de son mentor) mais ses propos étaient simples : nous sommes menacés par une « guerre ethnique » et il y a des gens qui veulent tuer du « Français blanc », elle les appelle des « francocides ». Le vocabulaire est en effet assez peu courant mais toute l’explication de Marion Marché Le Pen était claire : une immigration massive et incontrôlée dérive en affrontements violents chez des personnes (de toutes origines, de toutes confessions) qui n’acceptent pas les lois du pays d’accueil.
MMLP : le coupable n’aime pas la France
BFM : il est français, né d’une mère française.
MMLP Mais anti-français : tout le monde sait qu’il a déclaré sur les réseaux sociaux qu’il aimait la carte vitale, les soins gratuits, mais qu’il n’aimait pas la France ni les Français
BFM : Vous avez des témoignages sur ce que vous dites ?
MMLP : Oui, tous les témoins du drame ont bien vu qu’il s’agissait de détruire des Français joueurs de rugby qui se réunissaient ce soir-là. La maman de Thomas elle-même a déclaré qu’il n’y avait pas de doute sur les intentions de tuer. On ne va pas à un bal avec des couteaux longs d’un demi-mètre
BFM Il y a votre témoignage, mais l’enquête a entendu déjà une cinquantaine de témoignages, il faut attendre les résultats de l’enquête pour savoir qui sont ces coupables et quels sont leurs mobiles
MMLP Cela ne fait aucun doute pour tous ceux qui ont été les témoins de cette agression, qui a non seulement valu la mort à Thomas, mais blessé très grièvement trois autres jeunes, et blessé encore plusieurs autres.
Olivier Truchot : Vous n’avez pas le droit de dire quoi que ce soit tant que l’enquête n’est pas terminée et tant que la justice ne se sera pas prononcée.
MMLP Oui, c’est bien cela qui est en cause, les coupables ne sont jamais châtiés, ils sont coupables mais pas responsables.
BFM Ne croyez-vous pas que l’heure est au recueillement, n’avez-vous aucune émotion ?
J’arrête sur cette infamie, car finalement c’est Marion Maréchal Le Pen qui est agressée : visiblement pour BFM elle ne cherche qu’à séduire les électeurs :honte à elle !
J’indique tout de même qu’un des journalistes de BFM avait fait la subtile distinction entre un crime prémédité (ce qui n’était pas du tout le cas bien sûr), et un crime lié à une bagarre. Monsieur Olivier Veran, porte-parole du gouvernement ; devait être mieux informé : « il ne s’agit pas d’une simple bagarre » a-t-il déclaré à Romans hier.
Alors que les prénoms et noms circulent sur les réseaux sociaux depuis au moins cinq jours, le Procureur ne peut évidemment livrer le moindre détail sur l’identité. Il a dit que la plupart des jeunes arrêtés avaient déjà eu maille à partir avec la justice et condamnés.
J’ai parlé récemment du populisme1. Je l’ai expliqué (en partie seulement) par le discrédit dont jouit la classe politique dans de nombreux pays européens. Ce discrédit s’est marqué par le comportement des familles, tant à Arras qu’à Crépol : la marche blanche n’a pas été organisée ni présidée par des personnalités très connues (d’ailleurs Thomas n’a pas eu droit à une minute de silence à l’Assemblée Nationale). Le discours du grand père était très simple : Thomas, un jeune plein d’avenir, choyé par les siens et en particulier ses grands-parents, un joueur de rugby – ce sport qui crée l’entente et le respect des adversaires, un lycéen apprécié de ses maîtres et de ses copains, bref un Français tout simple, un bon Français – et le grand père de terminer dans les sanglots. Je prétends qu’un nombre croissant de Français veulent que la France cesse d’être politisée, si la politique n’est que mensonge et haine. Je prétends que la société civile est en train de sortir d’un asservissement distillé par le pouvoir depuis des décennies, et que la raison l’emportera bientôt sur le totalitarisme instauré par des idéologues, des présomptueux, qui peuvent être aussi des corrompus.
1 Cf. Mon article Qu’est-ce que le populisme ? lundi 27 novembre