J’ai d’abord été intrigué par cette pleine page du Figaro hier matin consacrée au « mystère Lisnard ». Mais au moment de rendre ce papier à mes rédacteurs, j’ai pris connaissance du Journal du Dimanche avec la redoutable interview de Nicolas Sarkozy qui conseille à Emmanuel Macron de faire alliance avec le parti LR. Jusque-là Sarkozy avait ouvertement soutenu Eric Ciotti, arrivé en tête au premier tour des primaires présidentielles (il avait battu Pécresse et Bertrand). J’ai de la sympathie pour Ciotti, pas pour Sarkozy.
J’en viens à me demander à quoi jouent les Républicains. Sont-ils soucieux d’élire début décembre un leader susceptible de redorer leur blason et d’assurer la survie du parti ? Sont-ils tentés par la trahison de ce qu’il reste de leurs convictions et, comme Muselier, Falco et Estrosi, sont-ils prêts à faire allégeance à Macron ? Sont-ils davantage préoccupés par les présidentielles de 2017 ? Wauquier se tient en réserve, Retailleau va-t-il le soutenir ?
J’ai apprécié les diverses professions de foi de David Lisnard et, comme le suggère l’article du Figaro, je me demande pourquoi il n’a pas voulu se présenter à la présidence de LR. Dans notre cercle de libéraux classiques et dans notre site nous déplorons la médiocrité des partis et l’absence d’un leader capable de porter une offre politique nouvelle. Mais précisément David Lisnard est un homme de foi, et de foi libérale. Il s’abrite actuellement derrière sa position de président de l’Association des Maires de France, qui l’obligerait à une certaine neutralité politicienne. Mais il tient dans les rencontres de l’AMF des discours qui ne font certainement pas la joie de son vice-président socialiste Laignel (qui lui reconnaît cependant un grand talent et lui porte une amitié certaine). Est-ce la candidature de Ciotti qui le gêne ? Le maire de Cannes et le député des Alpes Maritimes ont toujours collaboré – souvent contre Estrosi. L’article du Figaro laisserait entendre que David Lisnard estimerait que son heure n’est pas encore venue. Il se préparerait donc pour 2027, mais il ne pourrait plus bénéficier du soutien du parti LR – s’il existe encore. Lisnard a créé son propre parti (Nouvelle Energie) mais il lui faudra du temps pour reconstruire un LR bis avec le budget et le personnel acquis depuis des décennies.
Evidemment Lisnard n’est pas homme à rejoindre Macron, il l’a rappelé clairement à plusieurs reprises, et il ne faut pas oublier que l’Elysée a tenté de lui barrer la route pour l’AMF de façon assez brutale.
Lisnard peut-il sauver le parti LR en persuadant les trois candidats en lice de choisir celui des trois qui aurait le plus de chance de recréer un semblant d’unité dans une formation qui n’a jamais été réellement unie, divisée entre les juppéistes, sarkozistes, etc.
J’en reviens ainsi au fond du problème : SOS libéralisme.
Le parti LR, comme la plupart des autres partis français, n’a pas de doctrine digne de ce nom, il y a un mélange détonant de gaullistes de droite, de gauche, de conservateurs, de réactionnaires…et très peu de libéraux. Or, les électeurs français, qu’il s’agisse de consultations nationales ou locales, attendent une offre politique nouvelle.
C’est l’offre d’une rupture totale qui est aujourd’hui indispensable, et attendre 2027 n’est qu’un jeu politicien, qui sera à l’avantage et du despotisme et du populisme.
Donc pas de parti libéral pour l’instant. Pas de leader libéral pour l’instant. Mais, au fond, pourquoi m’en désoler ? L’important pour les libéraux n’est pas qu’ils soient à l’écoute des hommes politiques. L’important est que les hommes politiques soient à l’écoute du libéralisme. Je suis désolé de m’être laissé aller au jeu du Monopoly républicain.