La boussole de l’économie est devenue folle[1]. C’est un fait. Pourquoi ?
C’est un fait. La boussole devrait indiquer des besoins mieux satisfaits pour le plus grand nombre, mais aussi la possibilité pour chacun de développer ses talents, de réaliser ses aspirations, d’améliorer et de montrer son savoir-faire. Le nord de la boussole économique, c’est naturellement la personne humaine. Aujourd’hui la boussole va dans tous les sens : les jeunes chômeurs perdent leur temps et leur espoir, les plus âgés et les retraités craignent légitimement pour le futur de leurs pensions, l’emploi est menacé, le travail et le mérite ne sont plus honorés et on vit mieux avec les allocations, les fromages et les combines. Dans ce climat c’est « chacun pour soi, l’Etat pour tous ».
Pourquoi en est-on arrivé là ?
C’est que l’on a perdu le nord. On a oublié le sens véritable, les lois naturelles de l’économie, et on a bâti peu à peu une économie artificielle d’où l’homme est absent. On l’a chassé pour donner la priorité à la société : le collectif a pris le dessus sur le personnel. Sans doute les intentions étaient-elles pures : elles s’appelaient justice sociale, plein emploi, solidarité, stabilité. Mais, entre les mains d’hommes politiques soumis à la pression d’intérêts catégoriels, elles ont débouché sur le résultat inverse de celui recherché. Car les armes de la politique sont celles de l’administration, de l’impôt, de la réglementation, qui au delà d’une certaine dose finissent par tuer l’initiative, l’effort, l’entreprise. La justice sociale devient alignement sur le plus bas niveau, le plein emploi laisse place au chômage massif et durable, la solidarité forcée tue l’esprit d’entraide et le sens de la responsabilité, la stabilité se transforme en précarité. Et les nuages s’accumulent aussi sur les générations futures avec la dette publique et l’explosion des retraites.
Comment retrouver maintenant la bonne direction ?
Il suffit de revenir à quelques idées simples, à quelques principes naturels.
[1] C’était le titre d’un article que je destinais aux gens du Medef, car la présidente de l’époque, Madame Laurence Parisot, m’avait demandé de présenter un séminaire aux administrateurs et cadres du Medef. Vous pouvez constater que ce que j’écrivais en 2006 est mot pour mot ce que je pourrais écrire aujourd’hui !
Dix principes de l’économie naturelle
- Il est naturel pour chacun d’entre nous de chercher à satisfaire nos besoins et ceux des nôtres. L’économie commence avec nos choix de vie et nos efforts pour les réaliser
- Comme nos besoins sont personnels et divers, et les ressources pour les satisfaire aussi, il nous faut compter avec les autres : nous gagnons tous à nous rendre mutuellement service. L’économie est échange de services.
- Il est naturel, pour le service rendu aux autres, que nous recevions une juste rémunération ; sous forme monétaire ce revenu nous donne le droit à notre tour de consommer les produits qui ont notre préférence. L’économie est attribution d’un pouvoir d’achat en contrepartie d’un service rendu.
- Les échanges de services font l’objet d’un marché. Dans un marché chacun apprécie à sa façon le service qu’il rend et l’avantage qu’il en tire. Le prix du marché est celui que nous sommes finalement décidés à accepter. L’économie conduit à un accord responsable entre participants au marché.
- Le prix nous guide dans nos choix de consommateurs, mais il indique aussi aux entrepreneurs les choix qu’ils doivent faire pour nous satisfaire en tant que clients, en particulier les choix des moyens de production qu’ils doivent réunir et le prix auquel ils peuvent les payer. L’économie se guide sur le niveau des prix.
- La perspective d’un prix suffisant pour réaliser un profit décide l’entrepreneur à se procurer les ressources nécessaires pour produire, donc à embaucher et à investir. Le profit rémunère l’entrepreneur pour le service d’adaptation permanente qu’il rend. L’économie s’adapte en fonction des perspectives de profit.
- La plupart du temps plusieurs entrepreneurs se trouvent en concurrence pour nous proposer de satisfaire nos besoins. La concurrence les pousse à faire de leur mieux, à élargir nos choix et à réduire les prix. La concurrence suscite l’innovation, qui conduit à mieux adapter la production aux préférences que nous exprimons. L’économie est dopée par la concurrence.
- Mais l’innovation est aussi synonyme de changements. Les initiatives prises par les entrepreneurs conduisent à déplacer les emplois, les qualifications et les investissements au fur et à mesure que nos choix de vie se modifient. L’économie appelle la mobilité.
- La mobilité est d’autant plus grande qu’existent un marché du travail et un marché financier qui fournissent à tous des indications fiables sur les niveaux relatifs de rémunération des services productifs rendus. Nous sommes attirés par des salaires et des revenus financiers plus élevés, mais nous recherchons aussi la sécurité de l’emploi et des placements. L’économie est un choix pour le futur.
- Les choix que nous faisons, en tant que consommateurs, producteurs, épargnants, entrepreneurs, sont des choix responsables puisqu’ils engagent notre pouvoir d’achat, notre patrimoine et notre mode de vie. Ce qui fait la liaison entre la liberté de nos choix et la responsabilité de nos décisions est la propriété privée : à chacun revient ce qu’il a fait, les services qu’il a rendus, la valeur qu’il a créée. L’économie rend l’homme propriétaire de son œuvre.
ECONOMIE NATURELLE
ECONOMIE ARTIFICIELLE
Choix Personnels
Initiative privée
Choix Collectifs
Planification des priorités
Echange, service des autres
Répartition administrative
Services publics
Revenus d’activité
Rémunérateurs de services productifs
Revenus de répartition,
sans lien nécessaire avec l’effort
Prix librement débattus
Marché ouvert
Prix administrés, Tarifs publics
Métiers et professions réglementés
Concurrence
Réglementation,
Monopoles publics
Libre entreprise
Réglementation
Fiscalité sur l’activité et les résultats
Adaptation aux changements,
Réaction aux signaux du marché
Préférence pour le statut
Pressions politiques et syndicales
Innovation, mobilité, promotion
Routine, droits acquis et privilèges
Mondialisation,
Acceptation des différences
Protectionnisme
Harmonisation forcée
Propriété privée
Destruction de la propriété par la fiscalité, propriété publique
Responsabilité personnelle
Rupture entre l’action et la personne
Justice : promotion par le mérite et le service
Justice : égalité
Une réalité naturelle qui admet l’erreur
et les imperfections de la personne humaine
Un monde parfaitement organisé qui veut éliminer le risque et façonner l’homme nouveau