Deux observations au hasard. Au cours d’une émission sur LCI hier matin Pascal Perri,
économiste expert de la chaîne, est intervenu pour rappeler que les ressources consacrées
aux retraites avaient atteint 381 milliards alors que les recettes des cotisations avaient
atteint seulement 301 milliards : un déficit de plus – bonne remarque. Mais il n’a pas
prononcé une seule fois le mot « capitalisation ». Hier, dans un article du Figaro signé Wally
Bordas et intitulé « Assemblée : la réforme des retraites, l’autre épreuve du feu qui attend
déjà l’exécutif après le budget » le mot « capitalisation » n’est jamais apparu.
Or, ce qui est commun aux deux observations, c’est que la réforme des retraites est bien
l’une des urgences, et qu’elle est à ce jour une pomme de discorde entre partis présents à
l’Assemblée. Alors : comment aborder ce sujet sans évoquer la capitalisation ? D’ailleurs, de
façon plus générale, comment ignorer que la capitalisation existe, et que des millions de
Français en tirent les meilleurs bénéfices ?
Dans les colonnes de la Nouvelle Lettre, les articles consacrés à la capitalisation sont
nombreux 1 , tous inspirés par les travaux scientifiques de Jacques Garello et les
communications de l’Institut Molinari et de l’Institut de Recherches Economiques et Fiscales
(IREF). Ces articles nous renseignent sur des points essentiels :
1. Le système par répartition doit disparaître. Au rythme actuel le déficit annuel est de
80 milliards, il ne peut être comblé que par une dette supplémentaire de l’Etat : est-
ce le moment ? Pour autant, on ne peut imposer des sacrifices à ceux qui sont
aujourd’hui prisonniers du système : retraités actuels, ou le devenant dans moins de
quinze ans .
2. La seule réforme des retraites durable et sans dommage causé à quiconque est de
changer de système et de passer à la capitalisation. Mais la transition de la
répartition à la capitalisation se fait sur deux générations au moins, et les techniques
pour la bien gérer sont exigeantes.
3. Un ménage français sur trois bénéficie déjà de la capitalisation, c’est en particulier le
cas des fonctionnaires. Ce qu’ils gagnent avec la capitalisation leur permet de
compenser les pertes qu’ils subiront dans l’avenir avec la crise de la répartition
(cotisations plis élevées, pensions diminuées, âge de la retraite, durée des
cotisations, etc.). Certains Français ne sont pas affiliés à la Sécurité Sociale et leur
régime spécial est en capitalisation : pharmaciens, certaines professions artisanales
ou libérale.
D’autre part ceux qui ont les moyens et les informations voulus souscrivent à des
contrats d’assurance vie. Actuellement il y a beaucoup de publicité pour attirer les
chalands. Et ceux qui ne peuvent payer ?
4. Il y a beaucoup de partisans de la capitalisation qui veulent que les Français soient
totalement libres d’être assurés en capitalisation. Mais c’est pour sauver la
répartition, donc en oubliant de prendre en charge les retraités actuels et tous ceux qui ont déjà acquis des droits puisqu’ils ont cotisé depuis des années. C’est « la
capitalisation à la française ». De même l’appel à la participation obligatoire (financée
par les entreprises ou non) n’est pas un système crédible. La loi PACTE n’a rien réglé.
5. Une forme de capitalisation est également pratiquée par ceux qui accèdent à la
propriété d’un logement : arrivée à la retraite, ils n’auront pas à payer un loyer ou ils
pourront disposer des revenus d’un loyer. Ils échapperont ainsi à l’explosion de la
répartition (à moins qu’on confisque la propriété immobilière d’ici là !)
Il serait donc nécessaire de se soucier tout de suite de la seule réforme sérieuse et
durable : lancer la transition de la répartition vers la capitalisation. Des dizaines de pays
ont réussi cette transition depuis cinquante ans.
1 4 et 8 octobre 2023, 16 juin 2024 et 6 septembre 2024