Le décès de Benoit XVI a été en général salué avec beaucoup d’émoi et beaucoup de respect. Certes, il y a eu parfois quelques dérapages, concernant en particulier les difficultés traversées par l’Eglise au début du pontificat ; mais précisément Benoît XVI a eu le courage de s’attaquer à des dossiers qu’il a découverts et gérés ensuite avec rigueur et humanité.
Car l’humanité a été la référence permanente du Cardinal Ratzinger, et elle a naturellement inspiré ses discours et ses encycliques. Jean Yves Naudet vous propose d’ailleurs une lecture édifiante de l’encyclique Caritas in Veritate[1]. Caritas, c’est l’amour. Veritate c’est ce que l’être humain a en particulier, c’est ce qui définit l’être humain.
A la différence de toute création inerte ou vivante, l’être humain a la particularité de respecter la vie. C’est ce qui lui fait préférer la paix à la guerre, l’harmonie à la discorde, le service à l’exploitation. Hélas, le comportement de quantité d’êtres humains est indigne de leur nature. Voilà comment, à l’image de son maître et ami Jean Paul II, le Cardinal Ratzinger a très tôt dénoncé avec force les dictatures qui se sont multipliées au XXème siècle. Sans précédent dans une histoire pourtant fournie en barbaries, le nazisme et le communisme ont égaré et asservi les peuples. Ils étaient de même nature ; dès 1943 Hayek a rappelé cette évidence dans La Route de la Servitude. Mais les criminels nazis ont été poursuivis et condamnés, alors que les criminels communistes ont été impunis et sont même encore aujourd’hui honorés : n’auraient-ils pas détruit le nazisme ?
En réalité, Benoit XVI ne ramenait pas son humanisme à une approche géopolitique. Bien que très soucieux des relations entre religions et politiques il s’adressait à chaque être humain : c’est dans l’esprit et le cœur de chacun d’entre nous que se situe le débat entre ce que nous avons d’humain et de digne et ce que nous avons de bestial et d’indigne. La liberté qui a été donnée à l’être humain n’est pas un objectif, mais un chemin : le point d’arrivée est moins important que le voyage. Le voyage c’est ce que nous faisons de notre vie, c’est la signature de notre vie.
Benoît XVI a décliné cette responsabilité personnelle de l’être humain en rappelant les commandements moraux de la chrétienté, d’ailleurs héritées du judaïsme (Benoit XVI tenait beaucoup à rappeler cette réalité et ce bienfait). Mais ces commandements devraient inspirer et régir aussi toute « société de l’amour » (comme disait Jean Paul II). Tout d’abord l’interdiction de l’avortement, qui est atteinte à la vie d’un enfant à naître. Ensuite et par conséquent la signification de la sexualité : traduction de l’amour plutôt que plaisir érotique καριτας est différent de ηρος ) de sorte que Benoit XVI a fait intensément et intelligemment campagne contre le sida et a prié et plaidé contre le mariage homosexuel. Il en a déduit que l’Eglise devait interdire le mariage des prêtres (dont la seule union doit être à Dieu) et l’ordination des femmes.
Ces commandements moraux concernent assurément les chrétiens, ce qui a classé évidemment Benoit XVI dans la catégorie des « conservateurs », mais ils ont vocation à s’appliquer à tout être humain, en tout temps et en tout lieu, puisqu’ils traduisent la vraie nature de l’homme. La Vie, c’est la vérité de l’être humain. Voilà ce que nous dit Benoit XVI.
Voilà à mon sens un vœu et un projet pour cette année nouvelle : comprendre et maîtriser la crise de violence et d’indignité qui nous a frappés.
[1] Jean Yves Naudet L’apport de Benoît XVI à la doctrine sociale de l’Eglise Catholique « Un unique enseignement, cohérent et en même temps toujours nouveau » janvier 2023.