« Margaret Thatcher et Ronald Reagan ont précipité le monde dans la spirale infernale du néo-libéralisme, du chômage et de la pauvreté qui vont avec, sans parler de leur désir d’hégémonie… » C’est ce qui s’est écrit sur les réseaux sociaux. Des Pink Floyd à Renaud, Margaret Thatcher a inspiré des musiques et des paroles pleines de poétiques injures.
C’est donc mal parti pour Liz Truss, désormais Premier Ministre du Royaume Uni, puisqu’elle ne cache pas son admiration pour la Dame de Fer. Dans une vidéo remarquable à tous points de vue, Les Echos (27 août) évoque ce qui est commun aux deux femmes : convictions néo-libérales, caractère flexible, un grand pragmatisme : on peut s’attendre au pire !
Et que dire de son parcours ? D’une part elle a fait autre chose que de la politique : elle a travaillé dans le secteur privé comme comptable et commerciale – donc elle n’a pas fait l’ENA ou Normale Sup et elle n’adhérera au parti conservateur qu’en 2006 et ne sera députée qu’en 2010. Cela va expliquer qu’elle est « pro-business » : au Parlement, elle crée un groupe pour la liberté d’entreprendre, et son argument électoral majeur pendant la campagne qu’elle a gagnée aura été une baisse des impôts : horrible ! Personnalité politique elle a été ministre dans de nombreux domaines : éducation, environnement, commerce extérieur, Trésor national, relations internationales, elle a même été la première femme ministre de la justice. Elle n’a donc pas été parachutée par hasard au 10 Downing Street.
Relancer l’économie britannique en allégeant la fiscalité est évidemment le b a ba d’une politique libérale : Thatcher et Reagan ont bien commencé par là. La politique dite « de l’offre » a réussi alors que les gouvernements actuels veulent stimuler la demande en distribuant des chèques sans provision, de sorte que les déficits publics s’accumulent et que l’inflation s’aggrave puisque rien ne stimule l’esprit d’entreprise et l’investissement (surtout quand il conduit à des profits bruts).
L’autre rupture de la politique économique de Madame Liz Truss sera de revenir à des pratiques concurrentielles normales entre la Grande Bretagne et l’Union Européenne. Opposée au Brexit dans son principe elle veillera à ce que la frontière économique avec la République Irlandaise (Dublin) ne soit pas fermée. Elle a été très ferme contre les négociateurs européens dans les modalités du Brexit, elle ne saurait accepter la plupart des directives européennes, surtout depuis qu’Ursula van der Leyden règne à Bruxelles.
De l’économie à la diplomatie il n’y aura sans doute qu’un pas : Liz Truss n’a pas beaucoup de sympathie pour le couple franco-allemand actuel, et ses premières rencontres sont pour les Etats Unis (Joe Biden à Londres) et les pays du Commonwealth. De ce point de vue, Boris Johnson était imprévisible, d’ailleurs il n’a jamais eu de « conviction néo-libérale », et c’est la série de ses succès électoraux qui lui valaient la sympathie des Conservateurs. De la sorte le Brexit et la Grande Bretagne rejoignaient une mode politique largement pratiquée dans les pays phares de l’Union Européenne. C’est un tout autre schéma qui va désormais se mettre en place. Margaret Thatcher avait prononcé le discours de Bruges en 1988. La nouvelle Dame de Fer va-t-elle obliger l’Union Européenne a abandonner la lamentable tradition de jacobinisme et de dirigisme bruxellois ? Ce serait rendre un grand service aux peuples d’Europe.