La COP 28 était déjà assez mal partie : Dubaï capitale d’un pays riche en pétrole n’était pas le meilleur choix, on a laissé entendre que des pressions diverses, y compris financières, avaient été exercées. Choisir pour président un magnat du Pétrole local n’était pas non plus la meilleure formule[1].
Mais une fois les grandes délégations du monde entier reparties, l’Organisation des Pays Exportateurs de Pétrole (OPEP,OPEC en anglais) a froidement rappelé qu’il n’était pas question pour ces pays de diminuer (et à fortiori de cesser) l’exploitation de leurs énergies fossiles (pétoles, gaz, schistes, etc…).
Certes l’OPEP n’est pas un modèle du libre-échange. C’est un cartel de producteurs, chose incompatible avec un libre marché mondial. C’est de plus un cartel politique, avec des acteurs de premier rang comme l’Iran, l’Algérie et les pays du Golfe (Arabie saoudite, Emirats, Koweït, Bahreïn, Irak) et le Venezuela. La puissance du cartel, producteur globalement d’un tiers du pétrole exploité dans le monde, a suffi à stabiliser les prix mondiaux du baril au niveau qu’il désirait, tantôt pour augmenter (par exemple 1974), tantôt pour diminuer (par exemple 2008). Les Etats Unis et les autres pays pétroliers ont souvent eu du mal à neutraliser les initiatives de l’OPEP.
Mais voici que l’écologie s’invite dans la politique énergétique mondiale, et que la décarbonation appelle la réduction immédiate puis la disparition à terme des énergies fossiles. Certains ont eu la naïveté de penser que la COB 28 serait l’occasion de programmer l’agonie et la mort de l’énergie fossile. La naïveté ne résiste pas aux impératifs économiques, et au risque de polluer et détruire la planète voilà que les pays de l’OPEP annoncent leur intention de continuer leur commerce sans aucune réserve. Une lettre adressée par le Secrétaire Général de l’OPEP le 6 décembre va faire grand bruit, elle est jugée tout de suite « répugnante » par la ministre espagnole de l’environnement et la ministre française de la Transition énergétique Agnès Pannier-Runacher s’est aussi dite “stupéfaite” et “en colère”.
Mais qui, des écologistes et des pétroliers, a le sens des réalités ? Les pays producteurs d’énergies fossiles en sont aussi consommateurs. Réduire leur production et accepter ainsi une hausse du prix de l’énergie revient à ruiner leur économie. Ils ne trouvent pas d’énergie de substitution disponible et moins chère. L’OPEP avait toute raison de penser que la COP 28 allait enterrer leur économie pour sauver la planète. Aucun accord, même partiel, n’était possible.
En prenant quelque recul avec l’affaire plusieurs considérations reviennent à la réalité. La première est que la décarbonation n’est peut-être pas la meilleure façon de lutter contre le réchauffement climatique. Aujourd’hui la majorité des scientifiques démontre au contraire l’utilité du CO2, trop vite accusé de « gaz à effet de serre ». Une autre considération est le progrès technique qui accompagne l’exploitation des énergies fossiles : le Qatar fait remarquer qu’il convertit son pétrole en gaz liquéfié, sans danger pour l’environnement, les puits ne détruisent pas nécessairement les nappes phréatiques. Enfin et non le moindre la croissance économique peut se payer d’un trouble écologique, on n’est pas obligé de se référer sans cesse aux centrales à charbon de l’Allemagne. L’énergie fossile peut être une énergie propre, au même titre que le nucléaire.
Enfin c’est avec une belle régularité que se reproduisent les attaques contre la croissance économique, contre le consumérisme, contre le gaspillage des ressources naturelles. On a connu une offensive avec le club de Rome et le rapport Meadows, puis avec le GIEC et le développement durable. Les ennemis de la liberté ignorent que les êtres humains ne sont ni déchus (comme le dit la philosophie post-moderne qui égare actuellement les jeunes cerveaux) ni aveugles, ils n’ont pas besoin de « woke ». La seule et vraie ressource sur cette terre est l’initiative des êtres humains » : c’est « la ressource en dernier recours » (ultimate ressource disait mon ami Julian Simon)[2]. C’est l’homme qui a donné sa valeur à ce gaz noir et nauséabond appelé pétrole. C’est l’homme qui sera capable de lui donner le meilleur usage pour le plus grand bien commun : mais il lui faut la liberté de créer.
[1] Cf. Notre article du 04 décembre 2023 : COP 28 à Dubaï : Pétrole contre nouvelles énergies, Emmanuel Macron a-t-il fait le bon choix ?
[2] Cf : Julian L Simon the ultimate ressource préface de Milton Friedman du 21 juillet 1998