Il y a eu un avant, un pendant et sans doute un après
Un avant
Assez naïvement les journalistes avaient pronostiqué la chute de la loi proposée par la Commission Mixte Paritaire (CMP). Comme cela avait été le cas du temps de Hollande, la fronde s’était installée dans la Macronie. Les leaders du parti Renaissance avaient annoncé qu’ils allaient voter contre. C’était notamment le cas du Président de la Commission des Lois Sacha Houlié, et de l’ancien Président du parti En Marche Gilles Legendre. François Bayrou et le président du groupe Modem Jean Paul Mattei avaient déclaré qu’ils ne voteraient pas le texte. Voilà de quoi justifier le pronostic : la loi Darmanin ne serait pas votée. Plus grave encore : cinq ministres, dont le ministre de la santé Aurélien Rousseau, annoncent leur démission. L’affaire est dans le sac, ce qui autorise Marine Le Pen à annoncer que les députés RN vont voter en faveur du texte. Un vrai tremblement de terre : Macron devrait sa survie à « l’extrême droite » !
Un pendant
Mais c’est mal connaître notre Président. Il invite tous les membres de la majorité (relative) à le rencontrer à l’Elysée. Ici il va pouvoir mettre tous ces frondeurs devant leurs responsabilités : vous allez faire le jeu de Marine Le Pen, alors je vous demande de faire preuve de discipline, il ne doit pas manquer une voix pour la loi Darmanin, et ainsi nous n’aurons pas à apparaître comme les débiteurs de l’extrême droite. Bayrou et le Modem basculent sur-le-champ, plusieurs frondeurs comprennent le danger. De la sorte l’Elysée peut faire un coup d’éclat : nous n’avons pas besoin du RN pour faire voter la loi Darmanin. Du coup le Darmanin se déchaîne, il présente la loi comme un texte de gauche, d’ultra-gauche, en opposition totale à ce qu’il est réellement. Au passage le ministre de l’Intérieur se permet d’apostropher Marine le Pen de façon éhontée, alors qu’elle est une élue du peuple, comme ses 87 compagnons. Voilà donc une grave atteinte à la démocratie : ceux qui ne partagent pas l’opinion du pouvoir ne sont pas dignes de voter. Un coup de sifflet du chef : la récréation est terminée, les Renaissance et les Modem reprennent leurs godillots. Quant à la démission de Rousseau, il faut attendre aujourd’hui midi pour que le porte-parole du gouvernement confirme sa démission, alors que ce matin Elizabeth Borne avait déclaré qu’il n’y avait rien de semblable…
Un après
Nous attendons le discours d’Emmanuel Macron : à 20h et pendant une heure. Une certitude : il viendra nous expliquer que le texte était le meilleur possible, ce qui lui a valu un franc succès. Il rappellera qu’il le soumet immédiatement au Conseil Constitutionnel pour en tester la constitutionnalité. Et l’incident sera clos. Le texte sera promulgué, le Président n’aura pas à faire jouer l’article 10 ni à provoquer un referendum (article 11). Mais il faut maintenant ouvrir large les évènements heureux qui nous attendent, dès la rentrée : l’inscription de L’IVG dans la Constitution, la loi de « fin de vie » : de quoi régaler une gauche inquiète. Pour le reste on pourra toujours évoquer le drame de la bande de Gaza, la bonne entente avec les Allemands, les succès actuels et futurs de la diplomatie française. Il y aura aussi un couplet sur le pouvoir d’achat et l’aide que le gouvernement apportera aux plus faibles, immigrés ou non. Bref : nous voici revenus aux « Cent jours » qui nous ont ébloui à la veille de l’été. C’est maintenant les trois ans qui vont nous apporter, toujours ensemble et unis derrière notre Président, la croissance économique, l’harmonie sociale et la paix mondiale. Amen.