Toute cette semaine nous assisterons au redoutable spectacle du « Convoi de l’eau ». Le spectacle est celui d’un petit millier de cyclistes qui, partis des Deux Sèvres (Sainte Sélène, haut lieu de l’histoire écologique), progressent « pacifiquement » vers Orléans, puis projettent d’être à Paris dimanche 27. Par hasard, et parallèlement à ces braves gens, il y a des hordes de jeunes gens en cagoule qui multiplient les exactions ; hier ils ont dévasté le Golf du Haut Poitou, chaque jour des clôtures sont coupées, des plantations sont arrachées, des paysans sont menacés. Evidemment il n’y a aucun rapport entre ces deux bandes : l’une est pacifique, l’autre est violente.
Oublions donc la violence, on ne saurait l’attribuer aux organisateurs du Convoi de l’eau. Eux n’ont rien à redouter, rien à cacher. Ils sont membres de Soulèvements De la Terre (SDT), et fiers d’avoir été innocentés par le Conseil d’Etat et le Conseil Constitutionnel : le décret du Ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin de dissolution de SDT a été annulé par ces très hautes instances judiciaires. Les libéraux extrêmes vous diront que l’existence de ces Conseils est une négation de l’état de droit, puisque ce sont des juridictions d’exception : tout ce qui concerne l’Etat et les administrations échappe au droit commun, ainsi la Révolution française en a-t-elle décidé.
La réalité est qu’il s’agit, une fois de plus, de manifestations de l’écologie radicale et de groupuscules anarchistes. Pour eux, le problème n’est pas de sauver l’eau mais de détruire la société. La noblesse de leur idéologie les autorise à faire preuve « d’indiscipline citoyenne », c’est à dire à se mettre hors-la-loi. L’impunité leur est assurée : non seulement par les magistrats mais aussi par la classe politique, Mesdames Rousseau et Tondelier, Monsieur Mélenchon, soutiennent cet élan sympathique. C’est dire que l’on est passé du gauchisme révolutionnaire et stalinien au wokisme destructeur de société. Les woks américains donnent l’exemple, mais la France est tout de même honorée par cette philosophie puisque ce sont Deleuze Derrida et Foucault qui ont inspiré les universités américaines et démontrent que tous les malheurs de l’humanité proviennent du système que les riches capitalistes ont mis en place pour dominer le monde entier.
Tout cela est hélas bien connu, on ne peut parler de « théorie du complot » puisque les mots d’ordre, les tracts, les journaux, les discours de cette mouvance ont été diffusés depuis des années dans le monde entier.
Le véritable drame, sur lequel nous ne cessons d’insister, est que la plupart des Français sont prêts à admettre que le réchauffement climatique est la conséquence de la croissance économique dopée par l’horrible motif de rentabilité et de puissance. Ils admettent que la canicule soit la rançon du capitalisme et de la mondialisation, et que les riches n’aient aucun scrupule à gaspiller l’eau, qui manque à la masse du peuple. Le vandalisme contre un parcours de golf n’est-il pas un symbole ? Le golf c’est un sport de millionnaires.
Pour faire évoluer l’opinion publique à propos de l’eau les libéraux ont des arguments qui devraient être convaincants, ils méritent au minimum d’être connus.
1° L’eau n’est pas un bien public, car un bien public a deux caractéristiques : la non-exclusivité (nul ne peut s’approprier le bien) et la non-rivalité (la consommation du bien par les uns n’empêche pas les autres de consommer). Ces caractéristiques empêchent l’eau, comme l’air, ou la haute mer, d’être un bien marchand et de faire l’objet d’un contrat.
2° Donc l’eau n’a pas a être gérée par l’Etat et ses diverses administrations, la gestion de l’eau n’est pas un service public, pas davantage d’ailleurs que la gestion de l’école, de la santé, du logement, des transports, etc .
3° Parce que l’eau est susceptible d’être appropriée et de faire l’objet d’un contrat, la définition, la précision et la protection du droit de propriété sont indispensables. Le droit de propriété écarte le gaspillage et garantit que l’eau sera utilisée à bon escient, compte tenu des besoins des personnes et groupes concernés.
4° L’argument des « externalités » (privatiser c’est s’exposer à causer des dommages collatéraux aux voisins ou autres personnes étrangères au contrat) n’a pas de sens, il est même démontré que des biens publics peuvent faire l’objet d’initiatives privées : comme les phares maritimes, aussi vieux que la navigation.
Tous ces arguments ont été soutenus et étayés par la science économique, notamment par le Prix Nobel Ronald Coase et les théories de l’école des « property rights » (Alchian, Demsetz, Pejovic, etc.). Le compte rendu de ces travaux et leur exploitation actuelle ont été proposés par un article complet de Jacques Garello, il est opportun de s’y référer[1]
[1] L’eau n’est pas un bien public, c’est de l’or bleu , Catégorie Actualité, 20 mars 2023 (écrit au moment des manifestations contre les méga-piscines (nouvelle-lettre.com)