Evidemment pas : au moment où la Conférence sociale tenue à Paris lundi a donné priorité à la revalorisation des salaires des femmes, trop inférieurs à ceux des hommes, on ne saurait admettre une telle incongruité. En effet les travaux de Claudia Goldin, professeur à Harvard, sur l’évolution comparative des salaires, concluent que l’écart est tout compte fait très réduit : moins de 2% et cet écart n’a cessé de diminuer depuis cinquante ans.
Heureusement Philippe Lacoude, brillant jeune économiste formé par Pascal Salin, qui travaille actuellement aux Etats Unis, nous explique (dans un article de Contrepoint paru aujourd’hui même) que dans le domaine de l’économie du travail, les prix Nobel américains n’ont pas de chance en France : ils osent aller dans le sens contraire des idées reçues, c’est-à-dire de la pensée unique.
Pour nous en convaincre Philippe Lacoude nous rappelle comment un certain nombre d ’économistes et de journalistes avaient déjà commenté le prix Nobel d’Edmond Phelps, en 2006. Les travaux de Phelps l’avaient amené à une conclusion très nette : le salaire minimum est une hérésie, tant du point de vue économique qu’humain. Il ne protège pas les emplois, il les détruit, il ne garantit aucun pouvoir d’achat, il le ruine. Mais Jean Paul Fitoussi dans le Monde avait fait semblant de ne pas comprendre. Pour lui Phelps était connu pour toute autre chose (le taux de chômage dit naturel). Il est « néo-keynésien », dit le grand économiste, et on sait que les keynésiens sont de gauche. Donc : un Nobel à la gauche ! Quant à Christophe Losson il avait été plus tranchant : Phelps est inclassable. Le malheur est que Phelps a eu raison contre tous les partisans du salaire minimum, au point que les Suisses, peuple attardé comme on le sait sans doute, ont même rejeté le referendum pour un salaire minimum.
Alors, comment habiller la dame de Harvard ? Voici l’approche retenue dans Libération. Premier principe : pas un mot sur les travaux et surtout pas sur leurs conclusions. Ensuite : comparaison des prix Nobel d’Economie féminins et masculins : vous voyez bien que peu de femmes l’ont reçu, le féminisme est donc outragé. Ensuite : le prix Nobel est un faux prix puisqu’il a été inventé bien après la mort d’Alfred Nobel. Le prix Nobel d’Economie serait un « faux sobriquet » Circulez, il n’y a rien à voir…
On pourrait en rester au stade du mensonge et de la mauvaise foi, mais les libéraux, et particulièrement les économistes libéraux (et autrichiens) n’ont aucune peine à expliquer pourquoi le travail des femmes et des hommes ne saurait se comparer de façon systématique, au vu du « genre » :
1° Le niveau de formation et de compétence n’est pas le plus élevé du côté des femmes. On peut admettre un salaire différent pour celle qui n’a pas le brevet et celle qui a été major de polytechnique (il y en a eu)
2° L’appréciation du temps n’est pas le même entre la plupart des femmes et la plupart des hommes : elles sont plus avares de leur temps, elles veulent le garder pour leurs enfants, leurs foyers et même leurs maris ;
3° Elles investissent donc une partie de leur propre capital huain dans celui de leur progéniture, et c’est bien volontaire ;
4° Elles sont plus sensibles à la pénibilité et aux dangers du travail. Il est moins dangereux de défiler de la Bastille à la Nation !
La seule exigence à respecter dans l’étude de l’économie du travail est de se situer en situation de concurrence. Dans un marché libre, flexible, la concurrence affecte toujours les meilleures personnes aux meilleures fonctions. Le maître incontesté de Claudia Goldin a été Gary Becker , son professeur à Chicago – lui aussi prix Nobel en 1992 – (et doctor universitas causa d’Aix en Provence)
Philippe Lacoude de nous résumer ce que nous apprenons de Harvard :
« Les travaux de Claudia Goldin et de ses collègues de Harvard montrent que les femmes ne sont pas victimes de discrimination et que l’écart de salaire résulte presque entièrement de leurs choix personnels. »