Dans la revue Contrepoints on a commémoré le fameux « nine eleven » de 2001 : les deux tours du World Trade Center effondrées par des avions suicides. C’est un article de Frédéric Mas, ancien rédacteur en chef, publié en 2020, qui est fort intelligemment repris[1].
Frédéric Mas a raison de voir dans ce dramatique évènement un tournant historique : l’entrée de l’islamisme dans la vie quotidienne de millions de personnes. Il met en cause les ultra-conservateurs républicains qui ne pensent sur le coup qu’à des représailles. William Bush Junior, , qui vient de prendre la Présidence depuis le début 2001 se laisse entraîner dans deux aventures militaires : contre l’Afghanistan d’abord, contre l’Irak ensuite. Les Etats Unis essuieront deux échecs cuisants, leur crédit politique mondial va s’affaisser en quelques courtes années, bien que Bush soit réélu en 2005 contre John Kerry.
Voici le bilan plus précis dressé par Frédéric Mas : « La guerre à 7000 milliards, qui fit des milliers de victimes, n’a pas éliminé le terrorisme islamique, et le renversement de Saddam Hussein n’a pas été perçu comme une libération. Au contraire, le ressentiment contre « l’envahisseur » américain a transformé la région en foyer de radicalisation islamique et préparé son embrasement autour de l’État islamique, construit sur les ruines de l’ordre politique renversé par les États-Unis et ses alliés. »
Un autre point noir est celui de la « mise en place d’un système de surveillance sans précédent des individus » avec le Patriot Act promulgué dans la foulée (octobre) : l’état d’urgence est déclaré et pour l’essentiel il est encore en place. Les atteintes aux libertés publiques ont été multipliées[2].
Il faudrait ajouter à tous ces dégâts la nette inflexion de la politique économique lancée en 1981 par Reagan qui avait valu vingt ans de croissance permanente. La peur panique causée par les islamistes a fait craindre pour cette croissance américaine elle-même. De plus, Bill Clinton avait généreusement mais dangereusement lancé le programme de « subprimes » qui éclatera en 2008. Dès 2002 Alan Greenspan à la tête de la Federal Reserve a pris la décision d’abaisser les taux d’intérêt jusqu’à 1%, sans doute pour alléger la dette croissante du Trésor, elle-même en liaison avec les déficits commerciaux qui s’accumulent et la dévaluation du dollar. Avec Ben Bernake qui succède à Greenspan les dépenses publiques vont flamber, pour éviter les faillites immobilières et pour aider les populations de Louisiane atteintes par les cyclones Katrina et Riga Rita. Les Etats Unis se lancent ainsi dans une grande campagne de financement de la consommation, pensant ainsi compenser la crise industrielle qui frappe la métallurgie et l’industrie automobile (Detroit et la « ceinture de rouille »). Les choses ne vont pas s’arranger après 2008 et Obama lancera tous les pays de l’OCDE dans la surenchère keynésienne. Vivent les dépenses publiques, les déficits et les dévaluations du dollar.
La conséquence politique de l’échec de George W. Bush est la réussite de Al Gore, le candidat démocrate qu’il avait battu en 2000. Car Gore a pu bénéficier des échecs américains pour relancer la grande machine à détruire l’Occident, mise en place en 19991 à Rio de Janeiro : le développement durable, c’est-à-dire la destruction par les pays riches des ressources naturelles des pays pauvres, le nouvel impérialisme capitaliste. C’est sur cette orbite que nous évoluons aujourd’hui autour de la planète.
Oui, c’est bien un tournant historique qui s’est produit. Mais les accidents de parcours appellent heureusement des corrections salutaires, c’est aux libéraux du monde entier de travailler ) la restauration de l’ordre spontané et des valeurs morales qui l’accompagnent, elles ont déjà permis en moins d’un siècle d’accroître le bien-être d’une population mondiale passée de 2 à 7 milliards, Johan Norberg a fait le vrai bilan[3]
[1] Il y a aussi un article fort pertinent de Ph.Silberzahn. sur les défaillances de la CIA et de la bureaucratie américaine : 11 septembre 2001 ; Comment s’expliquent les strctures stratégiques 12 /09/2023
[2] Frédéric Mas vise en particulier les exactions commises dans le camp de Guantanamo où étaient prisonniers des islamistes et autres ennemis des opérations militaires engagés par les Etats Unis.
[3] Auteur du « Manifeste capitaliste » entre autres ouvrages – Johan Norberg démontre comment le libre échange mondial et le capitalisme ont sorti l’humanité de la misère et de l’illettrisme. Le 24 août dernier il a donné une interview remarquable à l’Express