Personne n’attendait rien de cette « conférence sociale », donc personne n’a été déçu. Pourtant la grève porte-bonheur du vendredi 13[1]avait été annoncée comme déterminante : le débat entre les partenaires sociaux allait être relancé à l’initiative de Madame Borne.
Il était déjà bizarre de magnifier cette rencontre dans un climat délétère tant du point de vue économique que du point de vue sécuritaire et international. D’autre part une négociation dont les parties annoncent à l’avance la couleur, définissent des lignes rouges, n’est pas vraiment promise au succès. Mais qu’importe ? Il fallait mettre un grain de sel social dans la cuisine de Matignon, et se rappeler que Madame le Premier Ministre est de gauche, donc du côté des salariés.
Sans doute des idées originales ont-elles émergé : égalité des salaires femmes-hommes, congé parental, résorption des « trappes à pauvreté », il y a eu cependant un résultat inattendu très positif : la création d’un Haut Conseil sur les Rémunérations (un Conseil de plus…).
Nous ne pouvons pas cependant passer sous silence la proposition de Madame Borne, qui a jeté un froid: elle a offert aux syndicats la possibilité de se servir des allègements de cotisations sociales (destinés à favoriser l’embauche) pour relever les bas salaires. De plus et surtout c’est le gouvernement qui désormais dirait quelles branches doivent bénéficier de ces allègements, et seraient pénalisées « les branches professionnelles dont les minima restent durablement en dessous du SMIC ». Elle a introduit quelque souplesse dans cette usine à gaz : on ne supprimerait pas tous les allègements, ni tout de suite, etc !
A notre sens, il n’y a rien à attendre de cette conférence, ni d’ailleurs de toutes les mascarades de négociations entre « partenaires sociaux »
1° Les partenaires sociaux ne sont pas représentatifs, ni du côté des salariés ni du côté des employeurs
2° Le contrat de travail et le marché du travail n’existent plus à partir du moment où il doit se calquer sur des accords nationaux ou des accords de branches.
3° Le niveau de salaire n’est juste que lorsqu’il résulte d’un accord entre deux personnes : le salarié et l’employeur. A l’intérieur de l’entreprise les salaires peuvent différer, pour des raisons innombrables : cela s’appelle la flexibilité. L’idée qu’il y ait une « asymétrie » structurelle entre employeurs et employés n’a aucun sens et n’a aucune preuve statistique.
4° L’idée que les syndicats décrochent des hausses de salaires n’a pas davantage de consistance, très souvent profits et salaires évoluent parallèlement, c’est l’acheteur qui marque sa satisfaction et paye un prix suffisant.
5° Enfin et surtout, les partenaires sociaux peuvent faire ce qu’ils veulent, l’emploi peut être rare ou abondant : de toutes façons d’est l’Etat qui décidera. Nous sommes bien en France.
[1] Cf notre article de la semaine dernière ” Un vendredi 13 qui porte chance à la France,Nous touchons le gros lot d’un syndicalisme et d’un secteur public gagnants “