Les ennemis du capitalisme ont remporté une victoire à la Pyrrhus.
Victoire : la faillite de la banque de la Silicone Valley, l’obligation pour l’Union des Banques Suisses de recueillir les dépouilles du Crédit Suisse en mauvaise posture. La Suisse n’est-elle pas aux yeux des libéraux un haut lieu du capitalisme ? Et la Silicone Valley ? François Hollande proclamait à l’envi « Mon véritable adversaire c’est le monde de la finance » (est-ce la raison pour laquelle il a choisi Emmanuel Macron pour siéger à Bercy ?)
D’ailleurs, en remontant (pas trop loin) l’histoire économique ne sait-on pas que la crise de 1929 est née à Wall Street, que la crise de 2008 est née des « prime bonds » (subprimes) ? Et, bien plus loin encore, la Révolution, Française a été annoncée par la faillite de la Banque Générale de Law et du Régent Philippe parce qu’ « il n’y avait plus d’or dans les coffres de la rue Quinquempoix » ?
Tout cela a été dit ét écrit. Mais la victoire est à la Pyrrhus parce que précisément ces crises n’ont pas eu pour origine le capitalisme, c’est-à-dire le libre marché de la finance, mais tout au contraire l’intervention des politiciens pour réglementer les activités financières. Quant au fonds, la monnaie et la finance se dérèglent lorsque la puissance publique s’en occupe. Mais elle ne s’en occupe pas par hasard, ou pour soutenir les banques en faillite, comme on le dit à propos de Joe Biden qui vole au secours des créanciers ede la Silicone Valley. Elle s’en occupe parce qu’elle cherche le moyen de couvrir des dépenses ubliques si importantes que les déficits et les dettes s’accumulent. Et quand la réglementation permet de fabriquer de la fausse monnaie officielle, cette monnaie qui n’a d’autre valeur que l’obéissance aux décrets de l’Etat, « fiat money », elle permet à l’Etat de percevoir un impôt très efficace : « l’impôt d’inflation » comme disait Friedman. Ce n’est pas nouveau : les empereurs romains y excellaient, comme plus tard les rois de France « faux monnayeurs » (Philippe le Bel en particulier) et plus tard les assignats de la Révolution Française, et les hyperinflations du 20 ème siècle (dont celle de 1927 qui conduit et à la crise de 1929 et à la montée de Hitler).
La réglementation des « marchés financiers » s’accélère
Un article de Rainer Zitelmann paru dans Contrepoints le 20 mars[1] nous apprend que la réglementation de ce qu’on appelle « marchés » financiers n’a cessé de croître aux Etats Unis « En fait, les marchés financiers n’avaient rien d’un capitalisme de laissez-faire. Juste avant la crise financière, 12 190 personnes travaillaient à plein temps à la réglementation du marché financier rien qu’à Washington, D.C., soit cinq fois plus qu’en 1960. En outre, les dépenses annuelles des États-Unis pour les agences fédérales chargées de réglementer le marché financier sont passées de 725 millions de dollars à 2,3 milliards de dollars corrigés de l’inflation depuis les années 1980. ».
La politique des taux d’intérêt : un crypto marché financier
L’outil le plus utilisé depuis quelques années pour « réglementer » le marché est le taux d’intérêt. Dès 1934 Hayek avait dénoncé l’écart entre taux d’intérêt monétaire (prix des liquidités monétaires) et taux d’intérêt réel (rentabilité du crédit à terme) comme source principale des crises économiques. Cet écart se creuse avec les manipulations des taux d’intérêt. Le taux d’intérêt est un prix : des liquidités ou des rendements. C’est « le prix du temps », le rapport entre le présent et le futur, rapport toujours inceratain, mais sur lequel les opérations financières s’adaptent obligatoirement.
Quand l’Etat fixe le taux, pour des raisons politiques, les adaptations ne peuvent pus se faire correctement. Ainsi avons-nous eu depuis 2008 une longue baisse des taux, allant même l’an dernier jusqu’à des taux négatifs (le prêteur perd de l’argent) et maintenant une hausse des taux aussi rapide que la baisse avait été lente. Au passage on apprécie que le prix Nobel d’économie soit allé à Monsieur Bernanke, le roi de la politique des taux ! il faut dire que les économistes keynésiens, et en particulier ceux du Fonds Monétaire International, ont été très écoutés, puisqu’ils partent du principe que la reprise économique se fait par une forte croissance des dépenses publiques financée par un fort accroissement de la masse monétaire. Evidemment les banques centrales ont été les acteurs majeurs de ces politiques de taux. L’opinion de Rainer Zitelmann était très claire sur ces points : « Des taux d’intérêt aussi bas ne résolvent en rien les problèmes sous-jacents – ils ne font que supprimer les symptômes et les repousser dans l’avenir. La combinaison actuelle d’une réglementation excessive et de taux d’intérêt nuls entraînera des problèmes considérables à moyen terme pour de nombreuses banques et constitue le terreau de nouvelles crises encore plus graves »
Il est vrai que les marchés boursiers peuvent avoir plus de stabilité que le crypto marché monétaire, puisque le rendement réel des actions peut traduire la santé des entreprises. Mais d’une part il y a aussi une spéculation boursière qui s’alimente avec la variation des taux, et d’autre part les bourses n’accueillent pas toutes les offres et demandes de crédits – même si les banques d’affaires y ont leur place.
La spirale d’intervention
Comme le rappelle Zitelmann l’expression est de Ludwig von Mises. Et c’est bien ce à quoi on assiste en ce moment : à trop baisser les taux on finit par avoir à les augmenter. Car s’endetter, contrairement à ce que disent les partisans du « théorème de l’équivalence »[2]c’est ne plus trouver de prêteur ou payer des intérêts ruineux… qui accroissent les déficits (cette année nos 30.000 milliards de dette publique nous coûtera 150 milliards, la somme la plus importante du budget de l’Etat).
La conclusion de cet article très sommaire est simple :
1° Il faut arrêter la réglementation des marchés financiers
2° Il faut en finir avec la dette publique comme moyen ordinaire de financement des dépenses publiques
3° Il faut interdire aux banques centrales d’émettre de la fausse monnaie, comme elles le font aujourd’hui
4° Il faut donc réduire les dépenses publiques, donc réduire la taille de l’Etat
Mais la conclusion de Zitelmann est plus fataliste : « C’est plutôt le contraire qui se produira : les politiciens et les médias citeront une telle crise comme preuve des échecs inhérents au système capitaliste et concluront une fois de plus, comme ils l’ont fait tant de fois auparavant, que l’État doit intervenir encore plus intensément dans l’économie. »
C’est comme si le voleur criait : « Arrête, voleur ».
[1] Rainer Zitelmann est l’auteur de In defence of capitalisme
[2] La dette d’aujourd’hui est équivalente aux impôts de demain : ce sont les générations futures qui paieront les dettes… à moins qu’elles s’endettent !